Ce matin, tout allait bien, j’ai fait le tour de terrain, je me suis amusée à compter mes pousses de tournesols. Il y en 84 de 4 sortes différentes ! L’été va être tout en soleils, je souriais à l’univers…
Puis je suis rentrée, j’ai eu un face-à-face avec l’esprit du ménage, obéissante, je me suis mise à la tâche. Juan est parti faire quelques courses et passer au courrier. J’ai commencé par ramasser les traîneries, astiquer, ramasser encore puis ce fut le temps du tapis. C’est alors que je passais tranquillement l’aspirateur que ma journée bascula…
Étant pleine de bonnes grâces, je me suis dit, « Allez, c’est fête ! chaque grain de poussière sera annihilé… » Le fauteuil derrière l’ordi est un repère félin, il n’est pas rare qu’un minou squatte la place pour s’y reposer les idées. Je pousse le fauteuil, je vois une queue qui dépasse, je me dis : « Attention, p’tit minou, tu vas te faire piler la patte ! » Pas de réactions, un clic se fait dans ma tête. « Voyons, comment ça il bouge pas ? » je me dis à moi-même. Je soulève à peine le fauteuil, et clac, le fouet de la vie accroche ma compréhension. Sans un souffle, en ce qui me semble un mouvement je sors en deux pas sur la galerie. Je respire. Je recommence à sentir l’air entrer et sortir de mes poumons. Je sais ! La mort a frappée en mon salon !
C’est un noir. Sumiko ? P’tite Sauvage ? Patapouf ? Mon cœur se serre. Prés du cabanon Sumiko me regarde. Ouf ! Pas ma Sumi ! J’entends le miaulement rauque de Patapouf qui trottine vers moi. Oh ! Non ! P’tite Sauvage ! Belle petite sauvage au regard de biche apeurée, je pensais à toi hier soir devant le feu, je voulais te dédier un post sur mon blog, je voulais parler de ta beauté farouche raconter ton histoire. L’univers est étrange ! Ce matin, tout cela m’était sorti de la tête. J’y repense en posant ces mots sur le clavier…
Juan est encore au village. Mon cœur est serré en pelote, Atlantik qui me comprend aux émotions me suit pas à pas, je vais m’asseoir sur les marches de pierres, je le caresse, il veille à mes cotés. J’attends Juan. Je ne veux pas rentrer dans la maison, je ne veux pas dealer avec la peine qui secouera mon petit cœur lorsque je verrais pour vrai, pas seulement du coin de l’œil et du cerveau ! J’attends, assise, le souffle court, le temps paraît s’allonger pour me narguer…
Le camion de poubelle passe, je dois avoir l’air de rien, assise là avec mon chat, sur les marches de pierres, en pyjama, les cheveux rebelles, je m’en fous, je suis triste…
Enfin, la voiture tourne et s’avance sous l’arche de lierre. Je ne bouge pas. Juan sort, me regarde :
- Qu’est-ce qu’il y a ? me demande-t-il concerné.
- C’est P’tite Sauvage, elle est morte. Les larmes commencent à couler, je les sens sur mes joues, je sens la vague de tristesse qui monte. Elle est sous le fauteuil, elle est morte…
Là, les larmes chaudes inondent mon visage pâle. Juan, abasourdi mais calme, rentre dans la maison, je le suis, il soulève le fauteuil, et apparaît alors, petite minette, toute raide, comme endormie, les pattes croisés, le corps détendu, la vie disparue…
J’épargne aux lecteurs, mes hoquets de petite fille triste, ma peine qui s’écoule en larmes. Le calme posé de Juan….
Nous allons l’enterrer, derrière, dans la forêt. Juan creuse une tombe, je le regarde tandis que les maringouins me bouffent la peau. L’on parle de P’tite Sauvage, nos mots au pays des réminiscences. Yoda arrive. P’tit Yoyo, je le prends dans mes bras. Le trou est assez profond, Juan va chercher p’tite minette. J’attends avec Yoda, un nuage de moustiques tourbillonne au dessus de ma tête, ils me piquent du cou en oreilles. Juan revient, il la dépose dans la petite fosse. J’éclate en sanglots. Je sais que ce n’est qu’un chat, mais c’est triste pareil !!! Je coupe une fougère et je la dépose sur son petit corps. Juan la recouvre de terre. Je fais une prière à la vierge dans ma tête. Elle repose en paix maintenant, il ajoute, avant de poser une plaque en fer à l’emplacement de la tombe. J’y tenais, sérieusement, au cas ou un animal sauvage viendrait la déterrer ! Nous rentrons à la maison, Yoda sur les talons…
Voilà, ce n’est pas la fin du monde, la vie continue, le soleil perce même les nuages pour nous éclairer cette journée triste et pluvieuse. Je ne pleure plus. Je suis grande et adulte. Jean est parti à Québec. J’écrirais bientôt l’histoire de P’tite Sauvage qui vécut 10 mois de liberté féline, belle comme le ciel, sauvage comme le vent. Là, je suis juste un peu trop triste…
L’esprit du ménage secoue la tête lamentablement, j’ai été coupée en plein élan ! Mais non, je te vois petit génie, je vais le finir mon ménage, et ma maison sera propre dehors comme dedans ! Je vais y mettre tout mon cœur, en l’honneur de cette petite âme qui est passée, et pour éloigner la mort, pas cool la mort, qui a frappé notre foyer…
Je ne pouvais écrire aujourd’hui sans en parler. Après tout P’tite Sauvage habitait aussi ce blog. C’est elle, le petit chaton tout noir, dans les photos sur le coté, alors qu’elle était bébé, l’été dernier…
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