jeudi, mars 03, 2011

Traverser l'épreuve...

15 comments
Traverser l'épreuve...

L'hiver avance, en mon quartier de brousse, la neige fait des bancs de plus en plus grands. Je compte les semaines en suivant la progression de la maladie puis le processus de guérison.

Les rénos ont pris une pause comme si le temps s'était arrêté. Comme si j'avais arrêté le temps en tombant malade. D'ailleurs le temps, dernièrement, je ne l'ai pas vu passer.

Le mois de février a disparu de ma mémoire et j'essaie d'accrocher le mois de mars avant qu'il ne s'efface...

La maladie suspend le temps qui s'efface entre les souffrances de ma peau qui bataille. Ma paralysie faciale prend du mieux, c'est la bonne nouvelle. Je retrouve peu à peu mon visage. Je ne fais plus peur aux enfants. Je garde encore mon look de pirate pour protéger mon oeil sensible. L'oeil est le dernier à revenir. J'arrive de nouveau à sourire. Mon âme peut de nouveau s'accorder à ma face. Je ne suis pas encore tout à fait symétrique mais je suis moins croche. J'ose de nouveau me regarder dans les miroirs que je croise.

L'épreuve que je traverse n'est pas une mince affaire mais j'ai décidé de la prendre de front et de ne pas me laisser abattre par cet affreux virus. J'utiliserai cette épreuve physique pour grandir plutôt que dépérir. Je suis en guerre. Au combat, je me bats. Parfois je tombe mais toujours je me relève. Je m’accroche le moral qui flanche à des petits riens qui font du bien. Je m'accroche les émotions à l'amour de mon homme et de ma fille, à la gentillesse de ma petite soeur et à l'amitié qui m'entoure.

L'amitié joue un grand rôle dans mon processus de guérison. Il y a les marques d'affection que je reçois virtuellement. Il y a mon amie Dee qui me couve comme une mère les jours où je dois aller en ville pour mes traitements de kiné. L'amitié est si présente en cette subite maladie que je la médite au quotidien. Sous peu, je désire écrire plus longuement sur le sujet, sous peu...

Il y a les sourires de M'zelle Soleil et ses paroles douces comme celles-ci de bon matin: "Maman, tu sais même si tu restes comme cela toute ta vie, on t'aidera toute ta vie!" Inutile de dire que ce matin là, mon coeur a fondu comme neige au soleil tout en explosant d'amour maternel!

Umbrella for sun or rain by B℮n on Flickr.
Et puis il y a la douleur, cette souffrance physique dont je n'aime guère parler. Je n'aime guère en parler car elle est si puissante qu'elle accentue la pitié. Et je déteste la pitié. La pitié, je l'ai connue pour la première fois lorsque j'avais 13 ans. La pitié déshonore, la pitié affaiblit, la pitié humilie.

Après un accident scolaire qui m'a enlevé ma capacité de marcher en plus de m'offrir un traumatisme crânien, un hématome au cerveau et des cervicales fêlées, j'ai connu la pitié d'autrui. Cet accident a été déterminant à ma vie. Il a posé les bases de cette liberté qui s'écoule en mon sang.

Cet accident m'a offert de terribles migraines, il m'a volé mon sens de l'équilibre durant quelques mois et il m'a fait énormément réfléchir. J'ai réappris à marcher et ce faisant j'ai souvent vu la pitié dans le regard des passants. Sans parler de ces remarques tristes que l'on entend dans son dos mais jamais en pleine face. La pitié est une sensation qui est remplie d'humiliation pour celui qui la reçoit. Je déteste la pitié. La pitié m'a appris les bases de la compassion et de l'empathie. Je n'ai de pitié pour personne mais de la compassion j'en ai beaucoup et souvent...

Bref, parler de ces douleurs de type herpétique que je découvre avec cette paralysie faciale m'est encore très difficile. D'après ce que j'en comprends, les douleurs herpétiques sont les pires douleurs névralgiques. Je confirme. Les vivre est un enfer que je ne souhaite à personne. Les vivre est digne d'un film d'horreur, d'un cauchemar à l'éveil, les vivre transforment mon âme. Mais comme je refuse de me laisser abattre, je choisis de les vivre et de grandir. D'utiliser la souffrance pour le meilleur plutôt que le pire. De cette souffrance que la vie me donne, je deviendrai une meilleure personne. De cette souffrance que la vie me donne, j'en tirerai les leçons nécessaires pour m'améliorer de l'intérieur. C'est un processus de fond qui se conjugue avec le processus de guérison.

Depuis que je suis sous morphine, je retrouve le temps qui passe. Les douleurs ne me contrôlent plus. Je reprends le contrôle. J'arrive à fonctionner, à penser, je revis. Je gagne quelques batailles en cette guerre personnelle. Fragilisée, je laisse les larmes couler puis je les sèche. J’apprends et comprends. Acharnée pour ne pas dire enragée, je vaincrai. Ainsi l'on peut dire que je vais mieux...

15 commentaires:

_MlleB a dit…

Les mots me manquent parce que je connais un petit, tout petit coin de tout ça... ça vient me chercher...

La douleur n'inspire la pité qu'à ceux qui ont eu la chance de l'éviter, qui la craignent comme on craint l'inconnu. Pour les autres, la douleur nous réunit dans une même communauté profondément humaine. Compassion, oui, pitié... rien à en faire...

Toutes les sensations, toutes les émotions sont temporaires. L'intensité est trompeuse. Seuls restent, ensuite, nos proches et cette intimité nouvelle qu'on a conquise en s'abandonnant à leurs soins.

Prends soin de toi.

Anonyme a dit…

Il y a de la poésie dans ta douleur physique et morale, c'est doux et douloureux à la fois. C'est souffrant et réconfortant.Que cette douleur te quitte bientôt, le plus vite possible, avec le printemps, elle fondera au soleil pour que tu puisses renaitre en santé! La maladie, c'est tellement d'impuissance, et ça travailler le lâcher prise ça madame! Je t'envoie énergie via ici! xxxxxx

Chloe254 a dit…

Ton texte et surtout ton histoire me touche. Toi qui mords tant dans la vie, c'est un choc, et ça nous rappelle notre fragilité. Ta détermination et ton courage sont inspirants, tu dois certainement tirer des forces de toute certes beauté qui t'entourer et que tu décris si bien depuis des années: ton lac, ta forêt, ta famille.

Porte toi bien, je pense a toi.

Valérie de Haute Savoie a dit…

Aucune pitié mais une grande envie de t'embrasser. Je n'aime pas non plus les regards de pitié, j'ai horreur de me plaindre, comme je n'aime pas les phrases détaillant ce que les autres vivent aussi de douloureux qui au contraire de consoler semblent plus là pour fermer à double tour ses propres mots de souffrance. Tu es tellement forte Etolane que tu ne peux qu'attirer de l'admiration et je souhaite que ce virus prenne la poudre d'escampette vite pour que tu puisses savourer le printemps qui ne devrait plus trop trop tarder.

Anonyme a dit…

ouf !...
Que dire... bon courage.
xxxxxxxx

LUNA a dit…

Les mots me manquent également mais je te souhaite bon courage.

Blandine a dit…

Tes mots, même quand ils sont enragés, restent dignes.
Tu es une battante j'ai la prétention d'en être convaincue, uniquement par ce que je lis.
Je t'envoie mes douces et positives pensées pour remonter ton sourire croche du bon coté.

Etolane a dit…

Merci Blandine, je crois que les épreuves renforcent et j'en ai connu pas mal au cours de ma vie. En fait j'avoue avoir peu de tolérance pour la lâcheté. Et j'essaie de prendre la vie avec courage et d'en apprendre les leçons. Je n'ai pas beaucoup d'ambitions matérielles mais j'ai en ai plusieurs existentielles dont celle de devenir meilleure avec l'âge. Ce matin, je dirais que mon visage a repris environ 80% de sa symétrie mais coté douleurs, c'est pas gagné et en creusant le sujet, je suis un peu inquiète alors je continue de me battre. Merci de tes pensées positives qui sont autant de graines que je plante dans mon jardin d'espoir...

Luna, merci beaucoup, je pense que le pire est derrière, je commence à voir de la lumière au bout du tunnel car le dernier mois restera longtemps ancrée en ma mémoire...

Morgane, merci beaucoup, je crois que de nos jours les gens ne prient plus comme ils le faisaient dans le temps mais je suis persuadée que les bonnes pensées que l'on souffle dans l'invisible de nos vies sont comme des prières modernes. Et je crois que les bonnes pensées aident beaucoup à surmonter ces épreuves que nous lance la vie...

Valérie, merci beaucoup de ces mots qui me touche beaucoup, ils me sont précieux... J'espère que le printemps m'apportera une renaissance comme il le fera pour la nature qui m'entoure...

Chloé, merci de ces pensées que j'apprécie énormément. J'avoue que se réveiller un matin avec une maladie si brutale et intense m'a fait tout un choc! C'était un peu comme me prendre un truck de 4 tonnes en pleine face! Et tu as raison, je tire beaucoup de force de la nature qui m'entoure et de l'amour et de l'amitié que je reçois. J'en suis reconnaissante et cela m'aide à ne pas me laisser abattre. Je me dis qu'il faut garder confiance en la vie même dans ses obscurités...

Marie-Julie, si tu savais comment j'ai besoin de poésie pour vivre. La poésie m'adoucit la vie, elle me permet de mieux respirer de l'intérieur et j'adore notre si belle langue pour la richesse qu'elle possède, une richesse qui nous permet de mieux nous comprendre. J'espère aussi que ces douleurs finiront par me lâcher car elles sont dans une sacré catégorie! Tu as bien raison, le mois dernier j'ai tellement du lâcher prise qu'il me semblait que je ne faisais que flotter. J'espère qu'on aura l'occasion de se voir au printemps pour célébrer la santé revenue! ;)

M'zelle B, je sais que tu as aussi ton propre combat contre la maladie et je te remercie de ces mots partagés qui me touchent l'esprit et le coeur. Tu as certainement raison sur cette intimité nouvelle que l'on conquiert en donnant le droit aux autres de prendre soin de nous...

samantdi a dit…

Etolane, je t'envoie tous mes voeux de rapide guérison. Quelle épreuve que tu traverses là... mais bientôt le printemps va dissoudre ce mauvais virus !

Yuna a dit…

Je me demande comment je réagirai moi, aurai-je ta force?
Tu me fais penser à une alchimiste, tu transformes ta douleur en expérience constructrice, j'en suis bouche bée....Tu m'inspires beaucoup de compassion et une bonne dose de respect.
Pfiouuuuuuu, une alchimiste !!
Quelques belles pensées pour toi, je suis sûre qu'elles peuvent te rejoindre et aider....

Caroline (La Belle) a dit…

Je suis sans mot en te lisant. Seulement envie d'aller te retrouver pour te faire une grosse colle :-) xxx

Anonyme a dit…

Malgré l’injustice de la maladie je fais partit de ceux qui pense que sa nous grandie et que le combat vos la peine d’être mené ! Ton récit le prouve, Courage !
julio

Beo a dit…

Gros bisous! J'avais rapidement lu sur FB que tu étais "encore" assaillie par la maladie.

Je viens de lire les détails et franchement ça fait peur!

Quoique.... si t'es allée voir Vanessa, hihihihihihi: y a de l'espoir!

Bon courage et bon dimanche!

Etolane a dit…

Samantdi, merci beaucoup, je sens que cette année le printemps va être bien important à ma vie!

Yuna, tes mots me touchent énormément. Inutile de te dire que j'adore l'alchimiste, alors c'est vraiment un super beau compliment! Merci de tes pensées.

Quant à savoir comment tu ferais pour traverser une telle épreuve, franchement, je te souhaite que tu n'en connaisses jamais la réponse car c'est vraiment une maladie que je ne souhaite à personne. Dis, je vais souvent voir ton adorable petit homme et à chaque fois, je me dis que te laisserai bien un commentaire! ;)

La Belle, un gros hug que je prends avec plaisir! Merci beaucoup...

Julio, merci, j'espère cependant que l'on peut grandir sans souffrance...

Beo, ah! Te revoilà ;) Oui c'est un sacré virus qui fait bien mal! Parait que le temps finira par en avoir raison! Mais comme le dit l'adage : Tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir! Pensées de brousse...

Beo a dit…

Oui: me revoilà même si je n'ai jamais été bien loin ;)

Un énorme passage à vide dont j'espère émerger vraiment tout bientôt!