mardi, septembre 14, 2004

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Lundi chagrin

Je trimballe au coin de mon cœur une subtile envie de pleurer. Les larmes aux rives du regard, je m’isole pour ne point sombrer. La foule qui gravite sur le campus m’étouffe. En attendant l’heure de mon cours de sociologie, je me cache, je fuis cette suffocation humaine en un petit coin de nature ignoré. Adossée contre un arbre les yeux dans un champ de fleurs, je frissonne avec ces feuilles qui m’abrite. À l’orée de ce jardin communautaire, baigné de lumière, je respire un peu mieux.

D’énormes tournesols tournent leur large tête vers le soleil. Je fais de même. J’avale mes larmes avec mes quatre sushis. Je suçote mes « car en sac » les pieds dans l’herbe. Je ferme ma bulle. Je plonge mon cerveau dans un livre pour essayer de moins penser. Les minutes passent et la tension se relâche. Seule, je repose mes émotions tourmentées par la perte de ma famille féline. Je pense à Hypérion que j’ai enfermé dans la maison avant de partir. Le pauvre doit regarder passer la journée derrière les vitres mal lavées. Mon cœur se reserre. Je déteste brimer la liberté féline en campagne. Mais ce matin, l’angoisse de le voir lui aussi disparaître dans la brume, fut plus forte que ma raison habituelle.

Cette douleur qui m’habite, et qui en réveille multiples autres, est aussi intime qu’invisible. Elle accompagne mes gestes et pose un voile de tristesse même lorsque le soleil, haut dans un ciel d’azur, illumine le grand jour. Plus que jamais, je me rends compte de l’importance des chats à ma vie. Excentricité vitale à mon équilibre mental. Un jour, j'espère que j'aurais de enfants, un mari aimant, que le tout évoluera avec la construction d'une famille plus humaine. Mon gouffre intérieur se comblera peut-être et les plaies sanguinolentes, profondément ancrées dans le lac de mon existence, se seront enfin refermées. Je n'aurais plus besoin de béquilles félines pour subsister. Même si je sais trés bien que quoi qu'il arrive, il y aura toujours, au moins un chat en mon cocon...

Lutter pour ne pas s’écrouler. Respirer intelligemment. Penser logiquement. Tout ce qui nous ne détruit pas nous rend plus fort. C’est vrai. Mais tout ce qui nous détruit pas peut aussi nous rendre plus dur. Je ne veux pas voir s’effacer cette douceur intérieure qui me caresse le cœur. Dilemmes, paradoxes, ironies, je me perds le sang en des labyrinthes sans fins. Si les émotions tissent l’étoffe de la vie alors présentement, perdue entre deux arbres, je me raccommode en silence…

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