16 heures à Montréal
L’occasion : La projection sur grand écran de Goom, l’adaptation libre et animée de mon ogre allergique par Astella dans le cadre de ses études universitaires.
2 :30 pm, l’on prend la route sous une incroyable canicule qui frôle les 30 degrés. 4 heures plus tard, nous voilà arrivés dans l’une des petites rues du centre ville, à deux pas de notre destination. L'homme n'en peut plus du traffic et m'amuse, ce qui me fait oublier cette pollution qui m'agresse les narines (Venez donc me parler des dommages de la fumée secondaire, que je rigole un petit peu, quand je pense à tous ceux qui respirent à l'année longue cette sublime concotion moderne et n'en pipent pas mot!)...
C’est avec grand plaisir que nous retrouvons jolie Astella et sa coquine de moitié sur le trottoir du campus urbain de son université. Astella est nerveuse, je suis curieuse. Nous entrons dans le grand bâtiment et bientôt commence la projection du festival de fin d’année des films d’animations. 13 projets plus tard mon cher Goom et ses problèmes alimentaires. Goom se concrétise sur l’immense écran et me laisse bouche bée de vérité. Quel bonheur que de voir s’animer un fragment de mon imagination sous mon regard ébahi. Une grosse minute de pur plaisir…
La talentueuse dame a su capter l’essence de mon histoire en son univers de pâte à modeler. La salle rit et apprécie. Je suis très fière du travail accompli. Merci Astella pour ce moment unique! Heureuse je suis d’avoir laissée voguer au vent mon histoire abracadabrante, heureuse qu’une jeune fille si gentille l’ait assez appréciée pour en être inspirée, heureuse…
La chaleur dans l’immense amphithéâtre est quasi insoutenable. La direction semble avoir été prise de court par la subite canicule et a oublié d’actionner l’air climatisé! L’intermission nous permet de casser une petite croûte, sauve mon homme de l’hypoglycémie rampante et ma pomme peut se délier les jambes ankylosées en quelque pas bien appréciés, j’en profite pour calmer mon estomac de sa rébellion. Avec surprise, je serre la main de Me, que je ne connais que virtuellement, agréable rencontre et léger papotage avant de retourner en salle voir le final du festival. Dans l’obscurité notre petite troupe est séparée, il fait toujours aussi chaud et la fatigue me gagne. Au bout d’une heure, de subtiles crampes me forcent à sortir de la salle. Pause pipi obligatoire pour madame enceinte et la nécessité de marcher si je veux que s’estompe cette autre douleur de grossesse qui me tord les ovaires.
J’en profite pour faire un tour de ce quartier que je connais bien. Je ne suis qu’à quelques mètres de l’immense immeuble qui abrita me jours alors que je débarquai de ma France natale, voilà dix-sept ans de cela. J’entreprends un étrange pèlerinage. Je retrouve ce banc où du haut de mes 15 ans, je papotai avec Laetitia Campagna (Laetie, si par hasard tu passes par là, fais moi signe, je pense encore souvent à toi et me demande dans quel recoin de la planète tu te caches!). J’observe les immenses vitres teintées qui cachent la piscine où nous fêtâmes les 16 ans de Ves. Je lève la tête et compte les 21 étages pour retrouver ce balcon familial où les bons jours, je m’amusais avec les copines à laisser s’écraser sur le pavé melons ou pamplemousses, pour la seule joie de niaiser le portier et de les voir s’éclater en mille morceaux (Je faisais toujours attention de surveiller le flot des passants pour ne blesser personne!) et où les mauvais jours, je devais résister à l’attirance du vide et me retenir de sauter pour le plaisir de me voir transformer en pastèque écrabouillée, histoire d’exploser en mille miettes ces douleurs internes qui me tourmentaient les idées. 17 ans plus tard, me voilà adulte, femme, enceinte, bientôt mère, que le temps passe…
Je cogite mes souvenirs d’adolescente au fil de mes pas. La faune humaine a changé mais les lieux restent les mêmes. Je m’arrête, pensive, devant la minuscule rue entre Guy et St-Mathieu où dans la passion de mon amour avec l’Autre, nous découvrions nos corps, aux petites heures du matin, blottis l’un contre l’autre dans sa R5 de gamin. Je traverse la rue et entre dans cette même papeterie où j’allai feuilleter revues et magazines. Habitude que je continue d’entretenir même si avec le temps, mes goûts de papiers ont évolué. J’achète le « Jane » difficile à trouver dans ma brousse. Je repasse devant le bâtiment universitaire. Je pressens mon homme qui, en effet, me trouve sur le trottoir inquiet de me voir si longtemps partie. Je lui indique ma douleur physique, lui explique mon trajet mental, ma crampe s’apaise mais me fait encore mal, je dois encore marcher. Je l’entraîne vers Crescent où l’attrait du Ben & Jerry est toujours aussi fort que dans ma mémoire. Malgré mes envies, je résiste au sucré pour partager avec ma moitié diabétique un pita tout chaud sur la rue d’en face. L’on reprend la direction des films. La joyeuse troupe d’Astella vient d’en sortir. J’ai raté Me, pas le temps de la saluer, j’en suis désolée, mais Dieu merci, ma crampe est enfin passée.
Astella qui nous gentiment invité, nous ramène chez elle et nous offre un logis frais après l’étouffante chaleur du centre-ville. L’on papote quelques heures avant de se décider à se coucher en voyant la conversation dégénérer de niaiseries en cochonneries. Fini le pyjama party, c’est le temps de roupiller…
8 :30 du matin, la clarté me réveille. La maisonnée est encore assoupie. Je prends une douche rapide, m’habille, Juan m’attrape pour une séance de câlinerie matinale. Astella, étonnée de nous voir déjà réveillés nous invite à monter déjeuner. Après une bonne nuit de sommeil, autour de toasts et céréales, l’on discute simplement des choses de la vie. Il nous faut bientôt rentrer. Juan doit être de retour au bureau en début d’après midi. L’on se quitte avec le sourire en se promettant de se revoir bientôt. Merci les amis de cette escapade urbaine, régénératrice pour mon esprit. L’on espère vous revoir au Lac d’ici la fin de l’été! Même Kitty le chat nous accompagne sur le pas de la porte. Il est dix heures passé, l’on quitte la grosse ville pour regagner la douceur de ma campagne chérie…
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