Discussion avec un acrobate des mots...
J’ai eu dernièrement la chance de pouvoir discuter autour d’un café de la magie des mots avec Hugo Fleury, chanteur et auteur des chansons du groupe de musique Polémil Bazar…
Leur nouvel album « Chants de mines » est un petit trésor pour les oreilles, tant par sa musique entraînante, que par ses mots finement articulés. Hugo écrit et rime depuis son adolescence, et cela se sent! À l’écoute des chansons de Polémil Bazar, la fluidité maîtrisée des chansons entraîne l’esprit dans une fête de notes joyeuses et de poésie troublante. Hugo Fleury réplique en souriant « J’ai toujours écrit en rimes, c’est devenu ancré en moi, alors quand je fais des impros en spectacle, je parle en vers... »
Polémil Bazar glorifie les artistes et la vie de bohème, ainsi que les mots et leur profondeur si utile à nos pensées articulées. Hugo joue avec les mots comme un acrobate danse sur un fil enchanté. Il fait la fête en s’amusant, ce qui ne l’empêche pas de cogiter longuement sur nos sociétés, sur ce futur qui nous dépasse…
Il n’aime guère la presse qui déforme et exploite « Je trouve vachement inquiétant cette tendance actuelle au cul, au sexe... » Il préfère de loin enclencher la réflexion. Amener les gens, jeunes et moins jeunes, à réfléchir plus loin que le bout de leur nez. Il n’aime pas l’idée de prendre son audience pour une foule des cons, il dit à ce sujet : « La différence entre le show-biz et l’artiste se fait au niveau de la vérité de ses sentiments. On est bombardé de faussetés chaque jour, de produits commerciaux, de faux comédiens de la chanson qui font de la cuisine toute faite avec des recettes établies. Nous, on préfère le respect que le public nous donne pour la démarche artistique que nous leur offrons… »
Hugo est un artiste sensible, contemporain, qui se tient au courant de ce qui se passe dans la francophonie, il n’aime pas les coïncidences arrangées trop faciles. Cet artiste intègre puise son inspiration dans les musiques du monde, le jazz, ses lectures, ses voyages…
Il avoue adorer Balzac et se dit très attiré par la littérature du 19ième. Il apprécie dans les mots de cette époque la richesse et la maîtrise aiguisée de la langue, il déclare « Si je peux donner à un jeune l’envie de s’intéresser à la littérature, de découvrir des auteurs, je serai bien content ! J’aime les textes ambigus, j’aime qu’il faille un effort intellectuel pour les analyser. Je ne m’en cache pas du tout. Je joue avec ça ! C’est ma façon à moi de perpétuer la langue, de participer à la survie du français, c’est un aspect crucial pour moi… »
Il perçoit un parallèle entre le 19iéme qui vit naître l’industrialisation et notre époque qui fait face aux conséquences des modes de consommations à grande échelle. Coté littérature, il aime aussi le style rigoureux de Philipe Djian, et se dit un véritable amoureux de la langue française…
Chanteur à la recherche de profondeur humaine, Hugo possède une conscience politique qui émerge dans ses textes. Il craint que les conflits mondiaux ne s’aggravent. Le mur entre l’occident et le monde arabe l’inquiète profondément, il précise cependant que leur prochain album sera moins politique : « Je suis un athée radical, cela me positionne beaucoup dans mon observation sociale. Je m’applique à voir la vie positivement et à rechercher le bonheur et la quiétude. J’aime célébrer l’esprit de la fête. La fête a deux aspects pour moi, celui de faire oublier ses malheurs et aussi celui de célébrer cette vie qui nous est chère. C’est bien le geste politique mais merde on perd rapidement l’intérêt des gens ! Faut laisser les gens respirer aussi, ne pas les bourrer, on prône la fête et la réflexion »
Il illustre sa pensée avec l’exemple du professeur qui avec humour amène ses élèves à assimiler sa matière. Hugo trouve qu’il est important de ne pas être pompeux. Il ne désire pas donner, à travers son groupe, l’image d’une bande d’intellos qui voudrait moraliser avec la chanson, il estime : «J’effleure les grands thèmes mais il est impossible en une chanson d’approfondir. Je soulève les polémiques et j’invite les gens à réfléchir ensuite. J’aime mettre le doigt sur le bobo, mais je ne propose pas de solution. J’interpelle et je laisse la place à la réflexion de ceux qui m’écoutent… »
La démarche artistique de Polémil Bazar est axée sur la qualité. Le groupe désire aller de l’avant en progressant avec le temps, en mûrissant d’albums en albums. Le premier album avait une démarche onirique, le deuxième une saveur politique, le troisième, déjà en chantier, sera plus humoristique, Hugo développe : « On va retrouver plus d’humeur, de l’absurde sans tomber dans le cynisme en utilisant juste une touche sarcastique. On est pas fatalistes, on est juste lucides, on est des chasseurs d’autruches, on chasse ceux qui se cachent la tête dans le sable… »
Alors en attendant la sortie du prochain album de Polémil Bazar, je vous encourage vivement à découvrir cette musique joyeuse et intelligente. Laissez-vous entraîner par ces joyeux lascars dans la ronde amusante de cette fanfare qui avale le cafard et qui vous emportera en son monde musical unique et merveilleux…
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