Moment d’eau…
Devant moi les bleus se nuancent à perte de vue, ils se mélangent et s’harmonisent avec l’automne qui nous gave de soleil. Effets de miroir qui m’enchantent. Le lac reflète le ciel, comme un joyau naturel, sa beauté m’émerveille. Les collines boisées qui sont l’écrin de ce petit bijou s’embellissent de cette, si jolie, saison. Entre sable chaud et futures glaces, les journées s’effacent dans l’air du temps bariolé….
Un peintre impressionniste divin est en transe. Chaque matin il agrémente de nouvelles touches de couleurs, le paysage qui se transforme en un incroyable tableau d’automne, un peu de rouge par ci, un peu de jaune par là, quelques gouttes de mauve et la ronde des couleurs changeantes s’accélère inexorablement…
Le ciel, sans ombres ni nuages, semble s’étendre jusqu’au fin fond du paradis. Le lac est de plus en plus calme, sauvage…
Si j’y pose un pied, il se forme multiples ridules dorées. Il se trémousse sous la coque d’un voilier qui le fend silencieusement. Il s’exclame de vaguelettes bruyantes lorsque passe l’un des rares hors-bords encore è l’eau.
Le soleil éclatant chauffe ma peau fiévreuse, j’évacue une autre semaine « urbaine ». J’ai la gorge qui me gratouille et la voix qui part en couill… Mais j’ai bon espoir d’être en forme pour mon examen de lundi!
Bruits d’éclaboussures à l’autre bout de la plage. Rires d’enfants qui se transforment en cris violents :
- Non! Papa! On fait encore! Attends… On fait encore!!!
- Allez on y va?
- Non! Encore une dernière fois!
L’homme et le petit garçon s’éclaboussent encore. Jeu d’eau et de lumières, paillettes argentées qui scintillent dans le soir couchant. Le soleil semble fatigué de cette si belle journée, il baisse à vue d’œil dans le ciel d'azur. Je sens la nuit, pas trés loin, la lune doit déjà se montrer la pomme…
Une mouche me chatouille le pied. Elle se balade entre deux grains de sable. Faudrait bien que je pense à refaire colorier mon tatoo! Alors que je réfléchis à ce fait, comme une feuille morte, me tombe sur la tête Shni le petit génie.
- Hé! Je m’écrie.
- Allo Étol, tu m’oublies?
- Non je suis juste occupée ailleurs…
- Quand même! Tu me négliges… Ne suis-je pas aussi l’une de tes priorités quotidiennes? Depuis quelques jours, je m’inquiète…
- Ecoute, p’tite chose, je te néglige, c’est vrai! Mais j’avoue que je m’en fous un peu parce-que d’un autre coté, j’ai récolté un 18.8 qui ne ravit malgré toi…
- Un 18.8?
- Ben oui, sur 20!!! Comme dans le temps!
- Oh! Serait-ce une note? Vous ne fonctionnez plus en pourcentages?
- Si, et en lettres aussi, mais là, je sais pas trop! C’est un cours de linguistique, chaque prof a ses trips, tu sais…
- Oh! Je vois… Et c’est pour cela que tu m’as envoyé aux oubliettes?
- Oui, un peu, excuse moi! Tu sais, je couve de quoi depuis quelques jours, c’est juste la vie qui se désarcorde un instant, cela fait partie de ses symphonies. Tu connais cela mieux que moi non?
- Mmmm, oui, c’est vrai, je serais supposé! Ok! Excuse moi de t’avoir dérangée, je vais te laisser passer ce petit « slackage » temporaire…
- Ah ben! Je savais pas que tu parlais québécois! Ton français est pourtant bien pointu et le génie avant toi était pire. Tu es local?
- Oh! Oh! Excuse, je me suis lâché, je ne suis jamais sensé utiliser autre chose que le Français universel devant la clientèle…
- Hein???
Mais avant que je n’ouvre de nouveau la bouche, il me fait un petit signe de la main et s’envole jusqu'à devenir transparent. Il se fond dans le bleuté de l’eau et du ciel. Le soleil s’est couché derrière les collines rousses. Le silence a retrouvé cette bande de sable désertée. Les derniers rayons de lumières caressent les feuilles des arbres qui s’enflamment…
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