Soupçons de futur
Depuis que j’ai enfanté, je me suis découverte une nouvelle perspective de l’avenir. Peu de temps après la naissance de ma fille, j’ai réalisé que le temps n’avait plus la même texture à mes sens. J’ai vite remarqué cette différence sans trop la comprendre. C’était comme si d’un coup, le futur prenait une forme concrète, comme si je pouvais presque le toucher, le palper. Au fil des quatorze mois passés, cette sensation s’est accentuée, une subtile transformation s’effectue en moi. Étrange notion, le futur à désormais un nom, celui de mon enfant.
Un enfant change le quotidien de multiples façons, certaines sont douces, d’autres rudes, le nouveau parent s’adapte contre vents et marées. L’enfant, source d’amour et de magie humaine, est, pour ses parents, une petite merveille qui se chérit. C’est un être innocent qui n’attend que de croquer dans la vie à pleines dents (à mesure que celles-ci poussent!!!). Le parent responsable est le gardien du bien-être de cet enfant qui est la suite de ses jours, la mémoire de son passage sur la Terre. Les enfants possèdent en leurs sangs des bourgeons d’éternité. C’est à travers leurs regards que nous laissons une trace. L’humanité se façonne par les enfants. Des enfants qui deviendront des adultes et qui engendreront à leur tour de nouvelles générations pour perpétuer cette humanité qui est nôtre. Dans chaque enfant se cache un morceau de futur. C’est ce qu’il m’a semblé découvrir en devenant parent.
Et c’est avec surprise que j’ai découvert hier soir que cette idée était le fond de l’histoire de ce film qui se situe en 2027. Que deviendrions nous dans un monde infertile? Dans quelles déprimes tomberait une humanité qui ne peut plus enfanter? Tissée sur une Toile de fond réaliste, l’histoire de ce film est des plus crédibles, c’est sûrement pour cela qu’elle remue et touche autant. « Children of men » est un petit bijou cinématographique qui roule sa bosse sans bénéficier d’une réelle couverture médiatique. Il recèle en ses degrés des idées à saveurs subversives qui font réfléchir. La problématique de l’immigration est mise à contribution, elle enrobe le scénario d’une poignante profondeur humaine. Voilà bien longtemps que je n’avais pas vu un film avec autant d’intelligence et de caractère! En sortant de la salle, nos amis et mon homme parlent du rythme de la caméra dont je me suis à peine rendue compte tellement j’étais en transe jouissive! En creusant un peu le sujet au détour de la nuit, je découvre qu’en effet, le réalisateur a désiré filmer, caméra à l’épaule, plusieurs scènes d’un coup sans coupures en se disant qu’il y gagnerait aussi en salle de montage, le résultat est saisissant. Évidement la chute est floue mais de toutes façons il me semble que je n'ai pas vu de fin satisfaisante depuis des lustres! C'est dans l'air du temps. Pour me rassasier, je pense que je vais me commander très vite la version écrite de PD James!!!
Ce film fait naitre en moi une idée confuse se développe dans ma petite tête. Et si la transformation humaine que l’on éprouve en devenant parent suffisait à garder l’humanité sur pieds? Me tromperais-je, emportée par des pulsions égoïstes, en pensant que la reproduction n’est qu’une facette de notre humanité? Se pourrait-il que les enfants soient le ciment de nos existences? En devenant parent, personne ne réagit de la même manière mais tout le monde ressent quelque chose de puissant. Et si à l’échelle planétaire, l’infime proportion de bonheur et de paix générée par l’action d’enfanter était ce petit quelque chose qui nous permettait d’avancer, d’évoluer, d’exister???
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