Journée d'hôpital
Hier matin aprés avoir déposé Petite Clo à l'école, nous prenons la direction de l'urgence. Nous découvrons cet hôpital tout neuf spécialisé pour les mères et enfants. La place même où je devrais accoucher d'ici la fin de l'année si tout se passe bien. Dans la salle d'attente, des bébés, des bambins et des parents attendent leur tour. Le nôtre arrive bientôt et nous nous retrouvons en une petite pièce pour attendre de me faire examiner. Juan s'étonne de la chaise et en lui montrant les étriers, je réalise que c'est sa première expérience gynécologique. Je lui explique quelques détails et je le vois blanchir puis rougir, j'avoue que cela m'amuse énormément. Je lui dis alors que je me déshabille et que je le vois être on ne peut plus mal à l'aise:
-Tu sais celui qui ausculte il y met la main!
-Hein? Mais si c'est un homme, je vais pas supporter!
-Ben il met un gant!
-J'espère “ostie” mais quand même, t'es sur que tu veux que je sois là?
-Ben oui, ça me rassure, pis c'est juste le début, va bien falloir que tu t'habitues...
Il fait les cent pas dans l'espace minuscule, je ne peux m'empêcher de rire devant son inconfort visible, il joue avec tous les boutons qui lui tombent sous la main, finit par s'assoir, se reléve, ne sait pas quoi faire de ses grandes jambes. C'est vraiment drôle de le voir aller, cela me fait presque oublier ce que je fais là et ce qui m'attend, parce-que soyons franche, je n'ai jamais été fan de mettre les pieds dans les étriers! Tandis que nous attendons un doute me parcoure l'esprit:
- Tu crois qu'ils vont en profiter pour me faire une prise de sang, cela serait logique non? Tsé quand j'étais petite, le docteur devait me courir aprés pour me faire mes vaccins. Pis des fois, fallait des hommes pour me tenir!
- Mais tu es grande maintenant!!!
C'est au tour de mon grand diabétique de se marrer devant ma peur de me faire piquer. À peine ais-je formulé ma crainte qu'arrive un infirmier avec fioles et piques, je fais la grimace. Je me plie devant l'inévitable, je me rappelle soudainement comment mes veines sont toujours difficiles à trouver lorsque je le vois me taponner le bras et regarder mes mains avant de décider d'y aller avec le bras. Juan me conseille de ne pas regarder, le voilà soudainement à l'aise! Je serre sa main et fais mon possible pour ne pas bouger. L'infirmier finit par trouver la veine et je sens mon sang s'écouler. Juan le félicite car d'aprés ce que je comprends, cela ne semblait pas évident! Je dis:
- Ouais, j'aurais pas fait une bonne junkie!
L'infirmier me répond en souriant:
- Vu tes veines, je ne suis même pas sure que tu aurais jamais réussi!
J'ai le creux du bras qui bleuit et l'homme s'efface avec trois fioles pourpres. L'on attend encore un bon vingt minutes lorsqu'arrive enfin le médecin, pas mal jeune, il semble gentil mais un peu perdu! Je lui explique mes symptomes, je ne le vois pas me rassurer beaucoup. Il m'explique ce qui m'attend et c'est au tour de Juan d'être mal à l'aise. Je me mets en position, je prends la main de Juan et passe à la torture gynécologique sans trop broncher. Passons les détails mais disons que Juan passa un aussi mauvais quart d'heure que ma pomme! La mauvaise nouvelle est que dû à l'un de ses problémes féminins bénins à l'origine, vu ma condition, l'on peut difficilement me soigner et l'irritation a légérement dilaté le col, ce qui augmente les risques d'une fausse couche. Je ne suis guère rassurée! Le jeune médecin m'explique qu'il fera ensuite une échographie pour vérifier l'état de l'embryon mais qu'il doit le faire avec un médecin expérimenté. Il sort et l'on attend encore.
Une petite heure passe avant qu'il ne revienne avec appareil et médecin grisonnant. Aprés quelques hésitations, ils finissent par trouver l'embryon, l'on voit battre son petit coeur. J'éclate en sanglot alors que Juan écarquille grand les yeux. Le vieux médecin semble rassuré, le coeur bat et l'embryon semble en bonne position, reste ce probléme qui met le tout en danger. Il explique malgré tout au jeune médecin que l'oeuf a l'air de bonne qualité et mis à part mon trouble féminin, tout semble correct. Il me conseille une fois encore le gros repos, peu de marche, pas d'effort physique et rester allongée le plus possible. Je commence à connaitre la rengaine! Il demande que je repasse une autre écho dans une dizaine de jours pour suivre l'évolution du col et de l'embryon et déterminer l'âge fétal. Le jeune médecin m'explique une histoire de sang et de compatibilité avec le bébé, je n'y comprends rien sinon que l'on doit encore attendre les résultats de mon test sanguin. Cela fait déjà plus de quatre heures que nous sommes là! Juan est trés content, il n'entend que les bonnes nouvelles et dépasse le traumatisme de sa première expérience gynécologique...
Je suis heureuse qu'il soit là, c'est moins difficile et je n'ose imaginer comment je ferais pour traverser tout cela seule, je le remercie et l'on attend la suite des évènements. Une grosse heure plus tard, je suis rappelée en une autre salle de consultation. Juan respire lorsqu'il remarque qu'il n'y a pas de chaise de torture. Revient l'infirmier et une énorme seringue:
- Ah! Non pas encore!!!
Il rigole et me répond,
- Oui, je dois te faire le vaccin machin truc, il faut piquer dans le muscle, tu veux la fesse ou l'épaule?
Je refais la grimace et répond vivement:
- La fesse!
Étonné, il s'exclame:
- Whaou, en trois ans que je fais cela, tu es la première à choisir la fesse!
- Ben, au moins la fesse, je suis sure de ne rien voir!!!
L'homme éclate de rire tandis que je descends une autre fois mon pantalon pour passer au supplice! L'infirmier pique et je grogne sous la douleur. Enfin c'est fini, il me dit que je peux rentrer chez moi. Je lui demande c'était quoi ce vaccin et il m'explique que cela doit être à cause de mon groupe sanguin mais qu'il faut demander au médecin, c'est un truc de compatibilité avec le bébé, une histoire d'anti-corps qui pourrait faire que mon corps rejette le bébé. Rendu là, je ne cherche plus vraiment à comprendre. Je suis vannée et tannée. J'ai l'impression d'avoir été regardée sous toutes les coutures, sans compter les aiguilles! Je suis heureuse de savoir que l'embryon semble correct, embêtée de devoir encore me reposer, je commence à m'inquiéter de mes examens universitaires...
Juan est tout ému d'avoir vu battre le coeur. Je réalise qu'il y a en moi un autre coeur qui bat, un coeur fait de lui et de moi, c'est aussi étrange que touchant. L'amour qui s'exprime concrètement et qui bat dans une petite bulle cachée au fond de mon corps.
Je dois encore attendre les résulats des cultures, je vais devoir être soignée, j'espère juste que cela pourra se faire autrement que par perfusion! Mais bon, je commence à capituler, s'il le faut, je ferais bien ce qu'ils me disent de faire. Tant que j'arrive à faire grossir ce petit coeur en moi! Ce matin, une dame m'appelle pour prendre rendez-vous pour une autre échographie, j'y retourne le 23 avril. Il reste à attendre les autres résulats et continuer de me reposer! Je commence à en avoir pas mal marre de me reposer!!! Je rêve du jour où je pourrais reprendre mes activités normales, retrouver ma vie...
Une amie me dit: “Tsé profite de te reposer maintenant parce-qu'aprés, tu sais pas quand tu pourras redormir à ta guise!” Tout ce que j'espère c'est de ne pas rater ma session, ce serait trop con, je suis tellement proche de la ligne d'arrivée!
Pour la première fois depuis des jours, je fais une nuit sans cauchemars peuplée d'étranges rêves mais pas vraiment dégeulasses. Je rêve que revient ma douce "Petite Crevette", gentille minette disparue dans le génocide félin de l'été dernier. Je vois aussi apparaître un énorme félin sur le pas de ma porte, une sorte de lynx géant qui me regarde avec curiosité...
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