Singe de ville...
La singerie de juillet chez Martine et Blork, porte ce mois ci sur nos premières impressions de Montréal (en particulier). Montréal?!? Pourquoi Pas? Allez, je plonge dans mon bac à souvenirs...
C’était en novembre 87, j’avais 14 ans. J’avais déjà pas mal voyagé sans jamais resté bien longtemps ailleurs, (Europe-Russie-Etats-Unis). J’étais fine prête à quitter mon jura profond pour la grande ville américaine. J’avais retrouver la marche, je ne faisais plus pitié dans la rue en clopinant misérablement, mon accident et son handicap étaient enfin derrière moi et devant moi, à l’infini s’étendait Montréal...
Nous sommes arrivées à Mirabel un soir glauque de novembre.De Mirabelle à Montréal, l'espace dans le noir. Nous débarquâmes au Ramada du Centre ville, ma mère et moi, avec nos deux valises. Trouver un appartement, reprendre l’école, tout était à reconstruire. Nous avions troqué la petite maison au milieu de champs pour la fièvre urbaine du centre ville. Je me rappelle de la première nuit comme dans un rêve. Nager dans une bulle d'idées floues, l’adrénaline qui pompe le coeur, trop de sensations et d'émotions différentes à assimiler, laisser glisser le temps. En une semaine, nous avions emmenagé dans un appartement au 21iéme étage, coin Guy et Maisonneuve. La fenêtre de ma chambre s’ouvrait sur un vide vertigineux et une floppée de lumières avaient remplacé les étoiles, lucioles de l’éphémère, la ville vibrait à mes pieds. Tout était nouveau, presque magique, surnaturel sur tant de points subtils...
J’allais avoir 15 ans, j’étais invincible. La ville me semblait être une immense film, un immense terrain de jeu où découvrir la vie, comprendre l’univers, tout était possible à mes yeux d'adolescente ébahie...
J’ai repris l’école sur Queen Mary. École française, gérée par la France, nid à poules rempli d’œufs en or flottant dans un luxe insouciant. Petite France à l’étranger, petit ghetto d'idées...
C'est de là que j'ai découvert le Café Campus, depuis transformé en Second-Cup non fumeur ( autre ironie de la vie qui s'éclate). Ah! Les mardis-rétros du Campus à 16 ans, lorsque l'on peut rentrer sans se faire carter et s'oublier avec des copains en se foutant de tout et de rien. Montréal était si belle dans ce temps là. J'étais toute jeune, si fraîche. Je prenais le bus du Centre Ville à l’Oratoire, (la 51, je crois en me farfouillant la cervelle), ou le métro Guy-Snowdon suivant le froid en vigueur. Ma réalité était irréelle. Le béton enrobait mon quotidien sauf lorsque je me perdais les dimanches au Tam-Tam de la Montagne. Montréal était la reine de mes nuits. J'étais émerveillée dés que j'ouvrais les yeux. J'aimais Montreal, ses gens, ses couleurs, sa diversité qui venait me chercher les trippes. Que d'aventures urbaines en ma mémoire. Je la contemplais, jour aprés jour, avec délice et curiosité...
J’avais l’impression que jamais je ne pourrais en connaître tous les recoins, elle me semblait s'étendre à l'infini. La comprendre et capter son essence me semblait une tâche incroyable. Je la savourais chaque jour, au détour d’un trottoir, au détour d’un nuage, j’étais en amour avec elle mais je ne m’en rendais pas vraiment compte. Je voguais dans une espèce de bulle étrange où dés que je sortais de l’école, de la maison, j’entendais toutes sortes de langues inconnues, dont ce français, qui sonnait si étrangement à mes oreilles, que je n’y comprenais quasiment rien. Je regardais les gens, bouche bée, essayant de capter ce français d’ailleurs et mon cerveau rageait de ne pas arriver à y voir clair. C’était encore l’anglais que je comprenais le mieux dans ce temps là...
Je nageais en toute liberté dans l’aquarium urbain, je m’amusais comme une petite folle, bien droite sur mes deux jambes qui fonctionnaient et obéissaient enfin à mes moindres désirs. La nuit, j’écoutais battre le pouls de la ville, un crayon à la main, je formais des phrases et m’efforçais de capter cet étrange environnement qui était mien. j'étais bien. Et puis la vie passa, je grandis, je vieillis, mon amour pour la ville tourna au vinaigre de framboise, mes premières impressions si heureuses se firent avaler par la vie gloutonne qui grignote son petit monde. Et je partis en courant me réfugier parmi les arbres. Mais ça, c’est bien d'autres singeries de vie, sans rapports avec celle-ci...
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