Peau contre peau
Depuis presque dix ans j’aime Juan qui m’aime. Même si ce n’est pas tous les jours roses, que certaines semaines sont grises, ce n’est jamais les ténèbres. Nos ténèbres personnelles n’arrosent jamais les racines de notre amour. Depuis huit ans que nous sommes mariés, j’aime toujours autant le contact de sa peau contre la mienne. La passion qui nous emportait lorsque nos corps se rencontraient à nos débuts ne s’est pas dissipée. Elle s’est cependant transformée en une sensation ultra douce qui me fait du bien chaque soir où je m’endors à ses cotés. Nos jambes s’entrelacent et la sensation de sa peau contre la mienne est aussi divine que le souffle d’un ange qui passe. La chaleur de sa peau pénètre mon cœur, avec lui je me sens bien, contre lui je suis heureuse.
Par amour je sacrifie d’un peu de mes nuits en subissant les assauts de ses ronflements incessants. Avec amour je supporte le revers de ma médaille même si parfois au creux de la nuit alors qu’il me sort pour la dixième fois de mes songes onctueux en me ronflant bruyamment dans l’oreille, ma raison bascule quelques secondes durant. Il m’arrive alors de ressentir une bouffée de haine primitive et violente qui me donne vivement envie de l’étrangler sur place. Dans ses moments là, je lui donne un coup violent dans les côtes! Il grogne et se tourne, je grogne et me retourne. Nos pommes de fesses se disent bonjour, sa peau apaise le feu de ma colère tandis que je me plonge la tête dans l’oreiller. Au petit matin, parfois, l’homme a des bleus. Ces matins là, j’ai souvent la gueule enfarinée. Lui ne se rappelle de rien, il a dormi comme un loir. Ces matins là, je ne me sens pas des plus amoureuses! Mais dans la chaleur de nos draps, il me sourit et me cajole, peau contre peau, la magie opère, j’oublie toute ma rancœur nocturne. Et je dois avouer qu'au bout de huit ans de vie commune, c'est la seule véritable rancœur que je connaisse à cet amour qui fait de moi sa femme...
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