Faire face à l'épreuve consiste à faire les efforts nécessaires pour la traverser et la surmonter. Aussi injustes soient-il.
Depuis près de quatre ans, je m'accroche à l'espoir de retrouver un dos fonctionnel. Tout en continuant de faire ces efforts qui me paraissent, certains jours, surhumains pour ne pas lâcher et avancer.
Ce faisant, je dois gérer les suites psychologiques de cet enfer physique où m'a transporté cette physio qui m'a explosé le dos, en affrontant une écoeurantite aiguë du genre humain.
C'est une puissante émotion qui me déconnecte, qui avale mes mots, qui m'enferme en silence. Ce qui est aussi une torture de l'esprit lorsque l'écriture fait vivre l'être qui affronte sans répit.
Quand la pandémie affecte le cours de ta santé fragilisée et retarde le cours de ta convalescence...
La pandémie, avec ses fermetures de piscines à répétition, complique dangereusement mes rééducations dorsales. Ce qui ajoute à cet océan de dégoût et de déceptions dans lequel je refuse de me noyer.
Pour tenir le cap, je me déconnecte virtuellement. Je me referme comme une huitre sur moi même. Je ne m'ouvre plus qu'à mon mari et à ma fille afin qu'eux en souffrent le moins possible. Je ne parle plus qu'au réel, de vive voix, avec mes amis locaux, que je vois toujours à deux mètres.
Notre gang de lac est composée de cinq adultes, un nouveau conjoint et trois enfants qui habitent en trois maisons différentes situées en un rayon d'un kilomètre. Nous nous voyons toujours sur le lac, toujours à deux mètres des uns des autres..
Lundi dernier, j'ai entraîné le noyau de cette gang à une méditation de 30 minutes dans le frette. Nous étions quatre adultes, tous distancés, par -15 degrés, à sept heures du soir, assis sur nos chaises de plage, emmitouflés, à méditer sous les étoiles. Une expérience hors norme que l'on risque de répéter. Jamais je n'ai senti le froid de façon si concrète...
Méditer pour ne pas sombrer. Méditer pour se muscler les neurones qui supportent et affrontent...
La méditation m'aide à gérer l'épreuve à traverser et ces rudes émotions que remuent le processus d'appel pour déposer une plainte à l'ordre des physios.
Un processus qui vient remuer ces sentiments de dégoût qui m'écœurent profondément. Cette physio est un parfait exemple de lâcheté, d'égoïsme et d'hypocrisie. Tout ce qui me dégoute des humains.
Bref, plus je me débats avec cette écoeurantite invisible, plus je me coupe du monde connecté. Mais je sais aussi que je ne peux "m'ensilencer" trop longtemps si je ne veux pas perdre le contrôle de l'ermite en mon sang.
Alors que j'oscille entre rage et gratitude, je persévère en ces rééducations physiques qui sont ma seule solution, pour me sortir de cette prison, dans laquelle je suis enfermée, à payer pour le crime de cette physio, libre comme l'air.
Au quotidien, entre deux vertèbres déplacées, j'oscille entre la rage des piscines publiques fermées et la gratitude d'avoir accès à une piscine privée. Même si cet accès ajoute de la complexité au quotidien, il n'en reste pas moins une possibilité de salut.
Une possibilité que j'apprécie et avec laquelle j'apprends à m'adapter. Pendant que mes vertèbres continuent de se déplacer en ma colonne devenue instable après "les bons soins" de ladite physio.
En ces dernières semaines, mes émotions oscillent aussi entre la colère du prix que coûte ma vie en traitements et médicaments et la gratitude ressentie envers les fonds reçus pour aider à continuer de me soigner. Sans cette autre collecte d'anniversaire, je ne sais comment l'on y serait arrivé et c'est bien dur à avaler.
Mes émotions oscillent entre l'humiliation d'être un cas de charité et la gratitude envers la générosité de ceux qui ont participé à cette collecte de fonds qui me permet de continuer de me soigner jusqu'aux remboursements des impôts de mon mari. Qui seront trop vite avalés en frais de soins de santé.
J'oscille entre la fierté d'accomplir physiquement ce que certains pensent impossible et la honte de ruiner mon homme pour y arriver. J'affronte et j'oscille dans le même souffle.
En cette dernière semaine, par trois fois, j'ai dû voir le chiro. À chaque fois, il a remis des vertèbres à leur place. De quoi alimenter la rage. Sachant que c'est la 125ième séance du genre. Mais la rage n'est constructive que si elle est canalisée, apprivoisée, contrôlée. Ce à quoi je travaille fort. Au prix de ces mots que j'étouffe...
Accepter ce qui est difficile plutôt que de s'en plaindre rend l'esprit plus fort...
Affronter l'épreuve, quelle qu'elle soit, comprend de l'accepter pour mieux l'affronter. C'est la première étape et pas la plus facile.
Accepter la difficulté ne fait plus partie de nos mentalités modernes. Ce qui, malheureusement, nous affaiblit puisque la vie nous rappelle, régulièrement, que l'épreuve fait partie intégrante de nos existences terrestres.
Je ne pense pas qu'il soit possible de vivre et vieillir sans devoir affronter d'épreuves humaines. Mais je crois qu'il est possible de longtemps vivre en choisissant de fuir l'épreuve plutôt que de l'affronter.
En la liberté de nos choix, celui là en est un des plus importants. Avec le confort de nos vies modernes, l'on perd l'habitude de traverser ces difficultés quotidiennes du présent, qui rendait nos ancêtres plus résilients. Cela nous nuit.
L'on s'obstine à se fait croire à des illusions de vie facile. L'on part à la recherche des plaisirs instantanés. Apprendre à attraper des morceaux de bonheur tout en supportant la douleur? Quelle idée folle! Pourtant, c'est celle là que je véhicule en mes pensées pour garder mon esprit stable.
De nos jours, on dirait que toute épreuve humaine est associée à de la malchance. L'on conjugue épreuve et échec en un même temps. L'on mélange tout et n'importe quoi à l'autel de ces égoïsmes qui font la norme à suivre. De ces exemples que je refuse de suivre.
Je crois que celui qui affronte l'épreuve de face, se renforce de l'intérieur. Je crois que celui qui la fuit, s'affaiblit. À long terme, je crois qu'affronter les difficultés permet la réussite. Et que la fuite ne peut que provoquer l'échec.
Alors, chaque jour, je décide d'affronter sans trop broncher. Je choisis de ne pas me plaindre. Je choisis d'affronter ce que je ne peux changer. Et je fais mon possible pour transformer ce que j'ai le pouvoir de changer.
J'accepte d'avancer avec les multiples douleurs physiques qui accompagnent mes maux. J'accepte d'effectuer ces efforts qui me semblent surhumains pour avancer vers un meilleur plutôt qu'un pire. Petit à petit, ma santé s'améliore.
J'écoute chiro et osteo m'expliquer que je suis en train d'accomplir, ce qui pour certain, est du domaine de l'impossible. Mon dos guérit petit à petit. Contre toute attente, mes efforts commencent à porter fruits. Tant que je continue à ne pas lâcher, la possibilité de surmonter persiste. Alors je m'accroche et je poursuis l'affrontement. Un pas aquatique à la fois...
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