mardi, janvier 30, 2007

Petit bilan

Petit bilan

Ce carnet de bord virtuel existe depuis avril 2003. Il a été visité plus de 200 000 fois depuis sa création. Ce billet en est le 2265ième.

Ce petit coin de blogosphère qui se déroule au fil des années passées aura vu, entre autres choses, l’extinction de ma colonie de chats, l’achèvement de mes études de traduction, la venue de mon premier enfant. Il aura vu défiler les saisons et les émotions. Il aura absorbé des morceaux de quotidiens au vol de ma vie pour s’en faire des cartes postales humaines. Il se fait le témoin de mon essence personnelle.

Une demi douzaine de ses brouillons de fictions, devenues nouvelles littéraires achevées, aura été publié dans différents recueils de papier. L’une de ces nouvelles terminées aura été nominée pour le Prix Aurora 2005. Goom, mon ogre préféré (inachevé) s'est joliment animé (sur grand écran) en quelques images envolées sous les doigts d'une artiste blogueuse. Plusieurs billets de ce blogue relatent de mes articles ou entrevues publiés dans la presse locale. L'extrait d'un billet choisi à saveur poétique s’est retrouvé imprimé entre les pages du magazine français Netizen. "Vol de mots" sera passé trois fois à la radio (Maldeblog, L’écrit du blog, 6ième sens)

Ma ligne éditoriale la plus claire se situe dans la liberté ultime du brouillon travaillé. Malgré quelques routines plus ou moins bien huilées comme le concept de trois citations autour d’un même mot, l’expression choisie de la semaine, les humeurs vidéos, les photos de mes natures ou les traductions libres, je cultive consciemment mon coté brouillon. Je crois que c’est un peu par rébellion. En fait, je ne désire pas voir ce blogue évoluer de manière à se spécialiser sur un thème en particulier. Je ne désire pas écrire pour plaire (même si cela fait toujours plaisir d'être lue), je veux juste écrire pour mon propre bien-être. J’ai besoin d’écrire pour vivre et le blogue est l'outil parfait pour héberger les zestes de cette passion qui fait circuler mon sang.

Ce carnet de bord est né d’une envie prononcée de discipline d’écriture. Il est une vitrine ouverte sur mes cuisines. Je le nourris de mes idées éparpillées et de goûts variés. J’y aiguise mes plumes. J'aime y retrouver ses génies fantasques. Fidèle, ce carnet de Toile se fait le compagnon de mes humeurs selon le cours de mes jours. Il est le reflet de mon humanité. Ce n’est pas un blogue de maman ou d’épouse, de traductrice ou de romancière, d’écologiste ou d’éducatrice, de journaliste ou de linguiste. C’est tout simplement le blogue d’Etolane qui s’élance au fil des saisons.

Souvent j’ai cette impression diffuse que c’est un jardin public pour passants anonymes. Pourtant parfois la magie de l’inconnu s’opère en des partages qui jaillissent au fil des commentaires. Les commentaires sont un peu à l'image des bancs où s’asseoir et placoter un instant. C’est une façon comme une autre de faire connaissance et j’y fais souvent de belles rencontres. Il s'en suit parfois d'étonnantes amitiés de blogosphère. Certaines de ces rencontres peuvent même déchirer le voile virtuel pour s’apprivoiser au réel. Je profite d’ailleurs de ce rare bilan pour remercier de leur fidélité ceux qui me suivent depuis plusieurs années. Je remercie aussi de leur passage tout ceux qui apprécient ce petit jardin de mes inspirations diverses et qui viennent régulièrement le visiter. N'hésitez pas à me laisser un signe de vie de temps à autres...

Ici, les mots se font manger par les regards d’autrui et c’est alors que les écrits s’envolent…

lundi, janvier 29, 2007

Hibernation

Balade-hivernale Abandonné

D’après ce cher Robert, hiberner exprime l'idée de : « Passer l’hiver dans un état d’engourdissement ». C’est exactement mon état présent…

Hibernation : n.f. – 1829 ; bas lat. hibernatio. Ensemble de modifications de toute nature que subissent les êtres vivants sous l’action du froid hivernal. Synonyme : dormance.

J’ai les sens engourdis, privés de stimulations extérieures, ils ne se nourrissent que de lumière vive, de ciel pur, d'espace et de blancheur qui se déroule à l'infini. J’ai le corps engourdi par l’entraînement intensif que je lui fais subir semaine après semaine afin de lui redonner une taille digne de ce nom à l'arrivée des beaux jours. J’ai la cervelle engourdie par mes instincts maternels.

S’occuper d’un bébé relève essentiellement du domaine de l’émotionnel. Il n’y a absolument rien d’intellectuel dans les tâches quotidiennes d’une jeune mère. Tant est si bien que j’en arrive parfois à la conclusion qu’il n’est vraiment pas nécessaire d’être un "prix nobel" pour être (à cet étape de développement), un bon parent, il suffit plutôt d’être en phase avec son cœur! Mon cœur est en pleine expansion. Il n’en finit pas de s’ébattre. Comblé par ces multiples petits moments de l’intime, il m’ébranle de ses bonheurs sereins. Il savoure ses réussites en silence. Il écrase ma raison de ses passions qu'il consomme avec joie. Petite ombre au tableau, mon cœur et ma cervelle se chamaillent sans cesse tandis que mes neurones engourdis hibernent…

La routine de l’enfant entraîne ma saison hivernale en un rythme de vie monacal. J’apprivoise ma bulle de silence. Je l'équilibre. Je bataille les feuilles blanches et mes pensées sombres. Je me dévoue à ma tâche. Entre deux rayons de lumière limpide, je perçois un ancien fantasme rejaillir d'entre les limbes, un vieux fantasme qui vient titiller mes instants solitaires. Un désir connu qui se dessine dans les songes de mes sens endormis. Une envie, de plus en plus forte, qui m’emporte. De nouveau, je veux caresser Robert. L'absorber pages après pages, au hasard de ses lettres, studieuse, entre deux palpitations émotionnelles, m'enivrer la cervelle de ses mots épars…

Monade n.f. - 1547 ; bas lat. monas, adis "unité", mot gr. Philos. Chez les pythagoriciens, Unité parfaite qui est le principe des choses matérielles et spirituelles. - (fin XVIIe) Chez Leibniz, Substance simple, inétendue, indivisible, active, qui constitue l'élément dernier des choses et qui est douée de désir, de volonté et de perception.

vendredi, janvier 26, 2007

Froidure nocturne

Froidure nocturne

Frigorifiée, je marche sous les étoiles au coté de Juan. Bien emmitouflée, je me recroqueville sous ma capuche. Mes narines se givrent avec chaque respiration. L’air est cruel. J’ai oublié mes gants. Je ferme les poings à l’intérieur de mes manches. Je remonte mon écharpe par dessus mon nez. Ma peau se durcit sous la morsure de la nuit glaciale. Les pieds bien chaussés dans mes épaisses bottes de Yéti, je foule la neige qui bruisse sous mes pas.

Entre mes bottes et mon manteau mi-long, mes jambes simplement recouvertes d’un jean souffrent le martyr avec chaque seconde qui s’écoule. Le moindre courant d’air leur est fatal. Mes cuisses brûlent de froid! Une sensation unique qui pince la chair mais qui, étrangement, ressemble à une brûlure. Un feu arctique m’attaque le corps. Déjà que j’ai failli perdre deux doigts en prenant des photos de froid!J’accélère mon pas.

Juan qui a oublié sa "tuque" est une cheminée humaine qui se fait absorber la cervelle par l’hiver revenu. Il s’en plaint en quelques remarques comiques. L’on court pour traverser les derniers cinquante mètres qui nous séparent de la voiture. L’habitacle est congelé mais l’absence de tout vent est déjà un soulagement! L’on démarre en trombe pour aller chercher notre petit astre bambin, bien au chaud, non loin de là. Il fait -25 sans facteur vent, ce qui doit donner une température ressentie d’à peu près -35 (ce matin -41! Le froid fait onduler le jour lumineux en une danse polaire, j'hiberne sous le soleil).

Hall-IIStatue-de-glace

Dans les chambres de l’hôtel de glace la température se situe autour de -5. Lorsque l’on arrive de l’extérieur, engourdi par le froid extrême, la différence est flagrante, il y fait doux, l’on y est bien. Ce qui me rappelle que chacune de nos perceptions est bel et bien influencée par le contexte qui la génère…

jeudi, janvier 25, 2007

Un froid de canard

Vu qu'aujourd'hui il fait -30 avec le facteur vent, l'expression de la semaine s'accorde avec la sensation du jour. Ce soir, c'est la grande soirée d'inauguration de l'Hotel de glace. La température intérieure ne descend pas en dessous de -5 mais les feux d'artifices à l'extérieur risquent d'être pas mal givrés! Cette nuit, je pars en safari photo, accrocher des inspirations de saisons à ma collection glacée...

EXPRESSION
« Un froid de canard »

SIGNIFICATION
Un très grand froid, un froid très vif.

ORIGINE
Cette expression viendrait de la chasse au canard, qui se pratique en automne, mais aussi en hiver où le chasseur doit rester immobile, aux aguêts, et laisser le froid lui pénétrer jusqu'à l'os en attendant qu'une de ses pauvres victimes veuille bien s'approcher suffisamment pour qu'elle ait des chances de finir en confit ou autre préparation culinaire.

Le canard se chassant pendant une période assez longue sur une partie de laquelle il ne fait forcément froid, il est nécessaire de préciser à quoi correspond ce 'froid de canard'. Comme chacun sait, Le canard vit volontiers sur les lacs et étangs où il a ses habitudes une grande partie de l'année. L'étendue d'eau le protège en partie de ses prédateurs terrestres dont les humains font partie. Lorsque la température devient très froide et que les étangs gèlent, le canard est obligé de se déplacer et rejoint des eaux vives, ruisseaux et rivières, moins sujets au gel, ce qui accentue sa mobilité et donc sa visibilité. Et ce serait en effet ces jours de froid très vif que le chasseur aurait le plus de chance de rencontrer ce pauvre palmipède.

Une heure avec Botero

Une heure avec Fernando Botero

Écouter le Maître parler de son Art fut une expérience mémorable. Absorber l'ambiance particulière qui se dégage de cette visite en sa compagnie. Oublier mon quotidien maternel pour me reconnecter avec la femme d'antan. Faire travailler mon intellect qui se languit en silence. Reprendre confiance en soi. Mais surtout, s'en mettre plein la tête, se régaler les yeux et savourer l'instant...

Volupté-HDR

L’univers baroque de Fernando Botero s’expose au Musée des Beaux-Arts du 25 janvier au 22 avril. Cette rétrospective unique éclaire toutes les étapes qui jalonnent la carrière de ce prolifique artiste. Mondialement reconnu pour son talent Fernando Botero donne du volume à ses réalités et construit son propre baroque sous forme de sculptures, dessins et gigantesques toiles. Son univers est aussi vaste qu’éclectique. C’est un artiste heureux qui se préoccupe de la violence et qui se permet de la dénoncer dans certaines de ses toiles. Ses œuvres incitent au bonheur et à la réflexion. Fernando Botero est un artiste en évolution qui se contemple pour la première fois au Canada avec cette exposition de 100 œuvres variées...

À suivre dans un prochain billet...

mardi, janvier 23, 2007

Mardi citadin,

Mardi citadin et petit nez mutin,

Lily-SoleilP'tit-clown

Réveillés de bon matin par notre petit réveil humain, je râle et je grogne. Le jour n’est pas encore levé, ah non! Cinq heures c’est trop tôt!!! Je traîne des pieds. Comme c’est une journée "pédiatre et vaccins", nous partons tous les trois en ville. Je laisse Juan devant son bureau et je prends la route de cette clinique qui ne reçoit que des petits bouts de choux. Lily-Soleil ouvre grand ses yeux et fait des sourires à la ronde...

L’enfant se porte comme un charme. 80 cm pour 11 kilos, elle se situe dans le 90ième percentile de la courbe de croissance canadienne. Elle a presque toutes ses dents. Il ne lui manque que les canines. Elle ne montre aucun retard, en fait elle pousse comme un champignon! Dans la salle je discute de la grande taille de ma fille qui fait presque deux ans avec une maman d’une petite fille d’un an . La sienne a plus d’une tête de moins que la mienne! Ce n’est pas la première fois que je remarque qu’elle est bien grande pour son âge et ce n’est pas la première fois qu’on me le fait remarquer. Du haut de mon mètre 60, je me demande quelle géante j’ai pondu! En discutant avec la pédiatre de quelques points qui me chicotent, je me rends compte qu’elle valide plusieurs de mes instincts maternels, c’est une bonne sensation…

Lily-Soleil est courageuse devant les quatre aiguilles qui piquent sa chair tendre. Elle pleure un peu sur le coup et pense rapidement à autre chose! Elle passe tout droit sur sa sieste matinale. Nous filons rejoindre une amie en ville pour un repas entre filles dans un petit restau bohème. Je la retrouve sur son lieu de travail et par l’un de ces hasards comme je les aime tant, je me retrouve avec une assignation de presse pour couvrir une expo le lendemain. L’on va garder l’expo mystérieuse pour l’instant. Disons que cela se passera dans un grand musée et que ce sera l’occasion de rencontrer un artiste mondialement reconnu. Un artiste que j’apprécie énormément. Impossible de résister à la tentation! Première assignation de presse depuis que j’ai accouché, rien qu'un petit article bonus pour un magazine littéraire en ligne, pas de pression, juste une bonne dose de stimulation pour mes neurones en manque de culture. Je suis ravie…

L’on prend le chemin de notre estomac avec une petite Lily-Soleil aux anges. Je suis toujours étonnée de voir comment le courant passe bien entre mon amie et ma fille. C’est une belle émotion. J’espère qu’un jour, elle deviendra maman et que nos enfants joueront de temps en temps dans la même cour. Le temps de rentrer dans les pénates de ma mère et la sieste d’après-midi de Lily nous est passée droit sous le nez! Tandis que l’enfant s’éclate avec sa grand-mère. Je manque de m’endormir dans mon fauteuil! L’enfant est sur des ressorts et je suis à moitié morte! Je la regarde s'amuser avec le coeur débordant d'amour. Mais décidément cinq heures du matin c’est trop tôt! Même le chien n'ouvre pas un oeil à cette heure là!!! Je me secoue les puces et l’on file chercher Juan au bureau.

La petite s’endort à peine déposée dans son siège d’auto. Elle ouvre les yeux lorsque nous nous arrêtons en route pour manger et repart pour un tour de manége bambin. La fatigue pèse lourd sur son humeur mais elle combat le sommeil pour profiter au maximum de sa vie. Une autre fois je constate le fait que moins Lily-Soleil dort et moins elle a envie de dormir! C’est son seul coté difficile, sans routine, elle brûle sa petite chandelle par les deux bouts, sa curiosité et son appétit de vivre la mène par le bout du nez. Cela m’a fait du bien d’en discuter avec la pédiatre ce matin et d’avoir la confirmation qu’en effet son sommeil est bon pour sa santé! Plus elle dort et mieux elle dort. C’est un point qui n’en finit pas de m’étonner. Cependant pour arriver à cet équilibre qui l’épanouit, c’est tout un travail de patience et de routine pour la jeune mère que je suis! Malgré tout, je refuse de me plaindre de mon sort car avoir une petite fille qui pète la vie est une chance que je conçois pleinement et j'en remercie souvent le ciel! J’espère qu’elle continuera à bien grandir, à souffrir le moins possible et à croquer à pleines dents dans la texture de ses jours…

Demain, j’irai croquer avec coeur et esprit dans cette matinée enrobée de culture qui m’attend la pomme!

P'tite-Pomme

lundi, janvier 22, 2007

Gelée fictive

Inspirations de saisons, écriture libre sur image choisie...
(une minute érotique)

Dans la nuit qui sévit à moins 20, l’étalon de glace s'éveille de son sommeil gelé. Son puissant membre s'étire devant la dame de givre qui se déshabille. Impudique, elle s'offre à sa vue. Des frissons d'appréhensions hérissent sa peau nue et la laissent transie de désir sur les fourrures rêches. Il s'approche. Elle se couche. Il la caresse. Elle s'ouvre. Il s'échauffe. Elle gémit.

Il s'enfonce en elle. Au rythme de ses élans nerveux, elle arc-boute son corps devenu brûlant. Elle soupire une sensuelle mélodie qui enivre le mâle déchaîné. La chambre s’embue de passion torride. Ils fondent de plaisir. Liquéfiés, ils se confondent et se dissipent dans le petit matin qui les oublie…

Bed-of-Ice

... des ailes

La parole est une aile du silence.
Pablo Neruda

La terre se nourrit d'empreintes, le ciel se nourrit d'ailes.
Miguel Angel Asturias

Les parents ne peuvent donner que deux choses à leurs enfants: des racines et des ailes.
Proverbe chinois

vendredi, janvier 19, 2007

Taggée

Petit matin autour de - 5. Cette semaine les températures auront été un peu folles! J'ai été taggée par Dre Papillon. Je dois avouer que cela fait des semaines que je vois passer sous mes yeux ce petit jeu de blogosphère sans trop y penser pour ne pas le voir venir! Joueuse, je me plie au jeu et creuse ma mémoire.

- Cinq vérités sur mon compte:

- Je suis une insatisfaite chronique en ce qui concerne le flot de mes mots et je n'aime pas en parler.

- Il y a quatre ou cinq ans, j’ai animé une capsule littéraire sur TQS à l’occasion de la St-Valentin dans une émission coquine du midi qui, de nos jours, n'existe plus.

- Plus jeune, j’étais une habituée de l’ancien Café Campus et de ses mardis rétros si exaltants. Lorsque l'endroit fut forcé de déménager au centre ville. Les amoureux de la place ne voulaient pas en entendre parler! Ils ne voulaient tellement pas le voir déraciné qu’une marche contre le déménagement du Café Campus avait été organisé sur Côte des neiges, j’y étais.

- J’étais au Stade lors de l’émeute du concert Metallica - Guns and Roses. Axl m’a ce soir là tant dégoûtée par ce comportement de trou de c… que je ne l’ai plus jamais réécouté. Comme d’hab Metallica était un exemple de respect du public, l’accident de James fut malheureux mais c'est le comportement imbécile d'Axl qui a fait péter la marmite! Je suis allée au Concert que Metallica a redonné au Forum (une fois James rétabli), pour les gens de cette soirée brûlante… (Update: Archives de l'émeute sur YouTube)

- J’ai passé un mois dans un monastère cistercien pour me recentrer après ma rupture avec l’Autre au printemps 1999. J’avais quitté la maison que j'habitais en banlieue parisienne, je ne me sentais nulle part chez moi, le coeur et la vie en miettes, je vagabondais autour de chez ma Mère-Grand. J’avais envie d'exil intérieur, de calme et de paix. L'Abbaye érigée au 12iéme siècle dans un coin oublié de campagne était une perle d’architecture. Y vivre fut une expérience presque magique. Seule femme dans une petite communauté de 27 moines, ceux-ci me laissaient une liberté d’exister sans borne. Normalement l’on ne peut passer plus d’une semaine "en retraite" mais l’un des frères, haut placé, celui avec qui j’avais eu une entrevue pour demander une place gratuite s’est pris d’affection pour moi. Il s’est arrangé pour que je puisse y rester autant que j’en avais besoin. Parfois, le soir, il faisait le mur du cloître pour que l’on puisse aller marcher en forêt. Je ne pouvais m’empêcher de constater l’atmosphère surréelle du moment. J’avais des discussions "mystico philosophico excentriques" avec un moine en habit d’antan sous les étoiles dans une forêt noire! Celui-ci me trouvait spirituellement précoce et plutôt divertissante! L'on faisait une drôle de paire! J’avais 26 ans, il était entré au monastère à 26 ans et il y était depuis 26 ans, étrangement, malgré les apparences physiques, nous avions à quelque part le même âge! Ce fut une expérience d’amitié toute particulière.

Cependant la meilleure conversation que j’ai eue fut avec un vieux frère de 80 ans, au monastère depuis ses 17 ans. Une corolle de cheveux blancs pour honorer un crâne dégarni et piqueté de taches, l’image même du moine sur les camemberts! Durant presque deux heures, nous avons discuté Jésus et Bouddha. J’étais pro Bouddha, il défendait la cause de Jésus. Finalement après multiples tours de langue et d’esprit, cordialement, nous sommes arrivés à l’entente qu’ils étaient égaux à l’échelle spirituelle. Celui-ci m’a impressionné par son ouverture et ses compréhensions profondes de l’essence humaine. Il y avait aussi le plus jeune frère, 27 ans, mignon comme un cœur, avec ses groupies de bénitier pour l’adorer. C’est incroyable comment sur certains points la vie de moine peut avoir de parallèles avec la vie de rock-star! Un jour, j'ai amené mon ordinateur au bureau des moines qui administraient le domaine pour leur faire visiter l'Internet et leur expliquer le concept. Cela aussi était un instant irréel. De toute la durée de mon séjour, aucun n'a essayé de m'évangéliser! En les côtoyant, j'ai ressenti un grand respect de l'autre et des différences humaines sans aucun fanatisme ou extrémisme religieux. Qu'importe ma foi, seul mon bien-être leur importait. J'en suis sortie régénérée et prête à faire la fête! Un jour j’écrirai sur ce mois en visite dans cette dimension intemporelle…

Je refile la patate chaude à Pascale, Line, France, Anne, Mijo...

jeudi, janvier 18, 2007

Etre aux anges

Une parenthèse en cette expression choisie de la semaine pour saluer le retour des coups de langue de la Grande Rousse dans l'infernale blogosphère...

EXPRESSION

« Etre aux anges »

SIGNIFICATION
Être très heureux, être ravi. Être dans l'extase.

ORIGINE
En voilà une facile à comprendre. Dans beaucoup de religions, s'il y a un endroit où on ne peut qu'être extrêmement heureux, c'est bien le paradis, cet endroit merveilleux où nous allons tous nous retrouver après notre mort (enfin moi, parce que pour ce qui est de vous j'en suis moins sûr). Et que trouve-t-on dans cet endroit de béatitude éternelle, virevoltant autour de nous ou assis sur les nuages ? Des anges en pagaille ! De là, il est facile de comprendre qu'être parmi les anges ou être aux anges est une image de grand bonheur. Maintenant, messieurs, pour demander à votre épouse si elle est ravie au lit, il ne faudra plus lui dire "alors, heureuse ?" mais "alors, aux anges ?"

EXEMPLE
« Ma femme est bien heureuse d'être grand'mère, Charles est aux anges d'être papa, Alice est ravie d'être maman, tu es enchanté d'être oncle, et moi je suis enchanté, ravi, heureux, et aux anges. » Victor Hugo - Correspondance

De bric et de broc...

De bric et de broc...

Grimace

À notre réveil, une fine poudre de neige tombe du ciel couleur d'ivoire. La température remonte pour se situer autour de -20 ce matin, c’est quand même plus confortable! Lorsque la température ressentie descend en dessous de -25, les narines se collent à chaque respiration, l’air brûle les poumons, c’est l’aventure thermique mais qu'est-ce que cela frigorifie!!!

Cette semaine est ma semaine de plagiat! Après avoir appris l’incident de ma photo (résolu à l'heure où j'écris ces mots), je découvre par hasard le plagiat de mes mots qui traitent de ce plagiat! L’ultime ironie. Encore une fois, je suis dépassée par l’intensité humaine! C’en est presque comique rendu là! Même si en soit, c’est bien peu drôle…

Les sourires et mimiques de Lily-Soleil me font oublier les niaiseries de mes pairs. Du haut de ses quatorze mois, elle enchante cet hiver qui perd la tête. Je me concentre sur ce petit être qui m’élève. Je crois percevoir une volonté de parler de plus en plus forte. Que l'humain part de loin lorsqu’il est question de parler! Pour l’instant à part son vocabulaire articulé composé de quatre mots (papa, maman, caca pour chat et nananan pour exprimer ses désaccords), tout n'est que charabia. Malgré tout, elle chantonne souvent en son drôle de langage!

Depuis peu, elle tourne sur elle même lorsqu'elle danse. Aujourd'hui, elle a découvert comment ouvrir une fermeture éclair. Je ne l'ai jamais vu si appliquée à une tâche, l'on dirait presque que cela révolutionne son petit monde! Elle utilise de plus en plus la gestuelle pour se faire comprendre ou exprimer une émotion. Elle tend la main en direction de l’objet qu’elle désire et baragouine ses idées. Elle lève les bras au ciel, ou bien elle pose ses deux mains sur la tête lorsqu'elle est surprise. Elle imite certains de nos comportements. Juan n’y comprend rien. Et pourtant c’est souvent bien clair pour la mère que je suis. Je déchiffre son univers de plus en plus facilement. Nous entretenons une communication non verbale faite de signes, de regards et de sons non articulés. Il y flotte une certaine magie. Régulièrement, je sonde l’apprentissage de ses compréhensions. Je lui demande des choses et j'observe ses réactions. Je teste ainsi ses connaissances acquises. Régulièrement l’on fait notre petit show devant son père qui reste bouche bée.

- Lily-Soleil tu viens te moucher?

Elle trottine vers moi, je lui pose un kleenex sur le nez. Elle se laisse faire. Je l'encourage.

- Allez souffle maintenant pour bien te moucher.

Elle fronce son petit nez et souffle l’air de ses narines avec cœur. Juan tombe sous le charme de son rejeton. Elle sait aussi mettre la cuillère à sa bouche, coiffer ses cheveux de plus en plus bouclés, ramasser les objets qu’on lui montre. Sa dextérité s’est nettement améliorée et sa motricité est excellente. Chaque chiffon est une éventuelle cape. Ses jours ne sont qu'aventure et curiosités. Elle a des comportements très féminins qui semblent innés. Elle adore se mettre des écharpes, des tissus, des fils autour du cou. Elle adore se promener avec l’un de mes sacs à main à l’épaule. Elle essaie de mettre ses petits pieds dans mes chaussures. Depuis quelques jours, je découvre aussi qu’elle aime bien avoir un bracelet au poignet…

Y a t il une période plus tendre que les deux premières années de la vie d’un enfant? Ses regards pétillants d'innocence pure, ses émerveillements quotidiens sont une douceur de vivre pour la jeune mère que je suis. Un vrai petit pitre que cet enfant! Bientôt elle sera assez grande pour aller expérimenter sa vie sans moi, bientôt je pourrais reprendre les rennes de mes jours. Je prévois cette transition fatidique pour l’automne. Et d’ici là, je suis bien décidée à me gaver la tête et le cœur de ces innombrables petits bonheurs bambins...

Catching-a-mouse

mercredi, janvier 17, 2007

Sapho et ma libido

Sapho et ma libido

Dans un café de la rue St-Jean, je parcoure des magazines gratuits. Je tombe sur Sapho, le magazine des lesbiennes de Québec avec en page couverture le titre d’un article pour « booster» sa libido. Hum, comme la mienne est en baisse de régime, je me dis que je vais sûrement avoir ma lanterne d’éclairée. Après tout qui mieux que les femmes qui aiment les femmes pour explorer le sujet?

J’ouvre le magazine et trouve l’article que je recherche. J’apprends que le secret est la détente, qu’il est utile de se relaxer avec de la musique et pourquoi ne pas boire une tasse de camomille?!? Je finis l’article avec la sensation d’être restée sur ma soif. C’est un peu léger, j’aborde une moue sceptique, je m’attendais à un plus de profondeur! On est loin de la sexualité exacerbée des hommes qui aime les hommes! Comme je suis assez femme épanouie pour connaître les solutions proposées, me voilà guère plus avancée!!! Même si l’idée de la camomille pour mieux jouir m’a quand même fait sourire! C’était presque mignon de douceur tout ça. Une fois de plus, je me dis que la sexualité des hommes ne peut guère se comparer à celle des femmes! Et dire qu’en bonne hétérosexuelle, il faut que je me dépatouille toute seule de la mienne qui déraille et de celle de l’homme qui bourgeonne! Le tout avec un temps limité et un bambin déchainé entre nos jambes...

- Ouais, ben les filles, j’voudrais pas être chiante, mais quand même sur ce coup là, je ne suis pas impressionnée par le savoir partagé!!!

Matin givré

Mercredi givré

Ce matin, l’hiver nous réveille avec vengeance. La fenêtre de la chambre est recouverte de givre. Alors que Lily-Soleil gambade dans la cuisine, j'allume la télé pour y écouter cette chaîne qui suit le temps. Avertissement de froid extrême! Il fait -40 avec le facteur vent!

Lorsque Juan ouvre la porte pour sortir, une atmosphère de congélateur se dégage de l'extérieur! La lumière est limpide. Le froid ondule sous le soleil, il s'engouffre dans la maison tandis que la chaleur qui file fait des bouffées de vapeur sur la galerie. Ce n'est pas moi qui mettrais le nez dehors aujourd'hui!

Le ciel est d’une pureté sans faille. L’air semble être fait de cristal. Derrière mes baies vitrées, tout n'est que silence. Plus rien ne bouge. Ah! Si. Un écureuil qui coure sur un fil perd régulièrement son équilibre, cela doit être bien glissant pour qu’il ait l’air si peu agile! Un chat manque à l’appel, j’espère qu’il n’est pas gelé dans un banc de neige!!!

mardi, janvier 16, 2007

Toucher l’Instant

Nouvelle poésie...

Depuis quelques semaines, je suçote par ci par là « Grand Corps Malade » de mes deux oreilles bien ouvertes. Sa plume est incroyable, empreinte d’une humanité maîtrisée, elle assomme, elle frissonne, elle s’envole. C’est de la poésie vocale qui élève l’âme. Utiliser les symphonies des mots comme instruments musicaux. Le talent de ce grand garçon met aussi de l’avant un nouveau genre, le slam.

Extrait de "Toucher l’Instant" :
« On a trempé notre plume dans notre envie de changer de vision

De prendre une route parallèle, comme une furtive évasion
On a trempé notre plume et est-ce vraiment une hérésie
De se dire qu'on assume et qu'on écrit de la poésie
Il existe paraît-il, un instant dans l'écriture
Qui oublie la page blanche et efface les ratures
Un véritable état second, une espèce de transe
Qui apparaît mystérieusement et s'envole en silence (…)

(…) C'est tout sauf une légende, on espère juste toucher l'instant
Les quelques secondes du poète qui échappent à l'espace-temps
Le moment où le voile se lève et la magie s'élance (…) »
Grand Corps Malade

Soupçons de futur

Soupçons de futur

Depuis que j’ai enfanté, je me suis découverte une nouvelle perspective de l’avenir. Peu de temps après la naissance de ma fille, j’ai réalisé que le temps n’avait plus la même texture à mes sens. J’ai vite remarqué cette différence sans trop la comprendre. C’était comme si d’un coup, le futur prenait une forme concrète, comme si je pouvais presque le toucher, le palper. Au fil des quatorze mois passés, cette sensation s’est accentuée, une subtile transformation s’effectue en moi. Étrange notion, le futur à désormais un nom, celui de mon enfant.

Un enfant change le quotidien de multiples façons, certaines sont douces, d’autres rudes, le nouveau parent s’adapte contre vents et marées. L’enfant, source d’amour et de magie humaine, est, pour ses parents, une petite merveille qui se chérit. C’est un être innocent qui n’attend que de croquer dans la vie à pleines dents (à mesure que celles-ci poussent!!!). Le parent responsable est le gardien du bien-être de cet enfant qui est la suite de ses jours, la mémoire de son passage sur la Terre. Les enfants possèdent en leurs sangs des bourgeons d’éternité. C’est à travers leurs regards que nous laissons une trace. L’humanité se façonne par les enfants. Des enfants qui deviendront des adultes et qui engendreront à leur tour de nouvelles générations pour perpétuer cette humanité qui est nôtre. Dans chaque enfant se cache un morceau de futur. C’est ce qu’il m’a semblé découvrir en devenant parent.

Et c’est avec surprise que j’ai découvert hier soir que cette idée était le fond de l’histoire de ce film qui se situe en 2027. Que deviendrions nous dans un monde infertile? Dans quelles déprimes tomberait une humanité qui ne peut plus enfanter? Tissée sur une Toile de fond réaliste, l’histoire de ce film est des plus crédibles, c’est sûrement pour cela qu’elle remue et touche autant. « Children of men » est un petit bijou cinématographique qui roule sa bosse sans bénéficier d’une réelle couverture médiatique. Il recèle en ses degrés des idées à saveurs subversives qui font réfléchir. La problématique de l’immigration est mise à contribution, elle enrobe le scénario d’une poignante profondeur humaine. Voilà bien longtemps que je n’avais pas vu un film avec autant d’intelligence et de caractère! En sortant de la salle, nos amis et mon homme parlent du rythme de la caméra dont je me suis à peine rendue compte tellement j’étais en transe jouissive! En creusant un peu le sujet au détour de la nuit, je découvre qu’en effet, le réalisateur a désiré filmer, caméra à l’épaule, plusieurs scènes d’un coup sans coupures en se disant qu’il y gagnerait aussi en salle de montage, le résultat est saisissant. Évidement la chute est floue mais de toutes façons il me semble que je n'ai pas vu de fin satisfaisante depuis des lustres! C'est dans l'air du temps. Pour me rassasier, je pense que je vais me commander très vite la version écrite de PD James!!!

Ce film fait naitre en moi une idée confuse se développe dans ma petite tête. Et si la transformation humaine que l’on éprouve en devenant parent suffisait à garder l’humanité sur pieds? Me tromperais-je, emportée par des pulsions égoïstes, en pensant que la reproduction n’est qu’une facette de notre humanité? Se pourrait-il que les enfants soient le ciment de nos existences? En devenant parent, personne ne réagit de la même manière mais tout le monde ressent quelque chose de puissant. Et si à l’échelle planétaire, l’infime proportion de bonheur et de paix générée par l’action d’enfanter était ce petit quelque chose qui nous permettait d’avancer, d’évoluer, d’exister???

Le meilleur et le pire

Le meilleur et le pire

Après avoir vu le meilleur film de mon année « Children of Men » (enfin un film qui vient autant me remuer les neurones que les émotions! J’y reviendrai sûrement dans un prochain billet à tête plus reposée), je découvre l'une des pires facettes du Net en rentrant chez moi. Une note dans mes courriels m’indique un membre de Flickr qui a volé l’une de mes photos! Après avoir parcouru l’endroit, je me rends compte que toutes les photos postées là semblent être volées! Je plains presque celui qui n'a rien d'autre à faire que de s'approprier les images d'autrui! Que sa vie doit être petite...

C’est la deuxième fois que cela m’arrive, sans compter la fois où un pauvre bougre avait carrément "copier-coller" l’un de mes billets sur son blogue en changeant juste les lieux pour mieux faire croire que cela venait de lui!!! Cette première fois m’avait un peu enragée. La deuxième fois j’étais plus calme, j’ai écrit au site en question qui a rapidement caché son délit en effaçant son méfait sans même prendre la peine de me répondre! Cette fois-ci, j’ai suivi ces directives pour exprimer mon mécontentement puisque le membre en question semble prendre un malin plaisir à ne mettre en ligne que des photos prises par d’autres! Je ne peux m’empêcher de trouver ce comportement pathétique. Faut-il être vraiment vide de l’intérieur pour piller ainsi autrui, pour grappiller la propriété de l’autre en toute impunité? Car même si cette propriété est abstraite, à saveur intellectuelle ou artistique, comme le dit le dicton : « Qui vole un œuf vole un bœuf… »

Dans le fond, je me rends compte que présentement cela me fait plus pitié que cela me fâche! Ainsi est faite l’humanité! Du meilleur comme du pire! La Toile n’étant rien d’autre que des reflets d’humanité, si l'on savoure le meilleur, il faut aussi s’attendre au pire! C’est le risque que l’on prend tous en exposant des petits bouts de soi. C’est le risque que je prends consciemment à chaque fois que je dépose en ligne des mots éparpillés ou une image! Parfois lorsque l’on me contacte pour avoir la permission d’utiliser une image ou un billet, j’en suis presque étonnée. Cela fait du bien de voir que l’on est pas tous des sauvages sans foi ni loi. J'essaie de ne pas penser au fait que si j'ai quelquefois découvert le pot aux roses, cela veut certainement dire qu'il est possible que dans d'autres cas isolés, je n'en sache absolument rien. C’est le revers de la médaille virtuelle. Certains donnent selon leurs conditions, d’autres volent sans émotions. Depuis la nuit des temps ainsi tourne le monde des hommes...

D’ailleurs suis-je moi-même si irréprochable? N’ai-je jamais écouté de musique ou visionné de films piratés? Hum... Moi qui vient tout juste de regarder des extraits pirates sur YouTube simplement pour me replonger dans l’ambiance de ce film tant apprécié (ne pas suivre ce lien si vous n’avez pas vu le film)? Cela dit mes délits sont minimes, copier l’autre est un crime au dessus de mes capacités. Si je n’ai rien à partager, je me retire. Mais si je partage, c’est aussi selon certaines conditions et je m’attends donc à un minimum de respect. J'aime l'idée de faire confiance à l'inconnu, après tout, peut-être ne suis-je qu’utopiste dans l’âme, une rêveuse de plus dans l'univers…

dimanche, janvier 14, 2007

Brouhaha mental

Brouhaha mental

Des journées ensoleillées succèdent à plusieurs jours de neige. Chez nous, l’hiver s’accroche à quelques nuits bien froides. Hier l'on frôlait les -20, presque un bonheur de saison. Un petit mètre de neige glacée recouvre le paysage malgré les températures douces des dernières semaines. Ailleurs l’hiver se perd. Ici, entre monts dénudés et lac givré, il résiste.

Petit passage à vide pour ma pomme. Même si j’avais bien dit : « Elle ne passera pas par moi! ». Elle est passée quand même la maudite!!! Sans être virulente, elle a fait rejaillir de bien mauvais souvenirs de cette année passée à essayer de survivre à ma peau. Je m’en sors indemne mais essoufflée. Si l’on reste objectif, je suis en bien meilleure forme que je l’étais à pareille date l’année dernière. Je n’ai pas encore retrouvé toute ma séduction mais ma santé est en bonne voie de guérison.

Juan me dit :

- Tu es dans un creux de vague ma chérie. Tu as besoin de te stimuler les neurones. Un bébé ça apporte plein de choses mais cela ne stimule pas les neurones…

Je grommelle. Les jours passent et je me rends compte de la sagesse de ses paroles. Cela m’énerve. Emportée par ce tourbillon de sensation qui éclairent cette autre transition, je me débats le coeur. Avec la naissance de l’enfant, la naissance du parent qu'il faut éduquer. Je me laisse ballotter dans d’étranges vagues émotionnelles. Il va falloir que je me détache un peu de l’enfant. Cette simple pensée me bloque toute entière. J’ai le cœur épanoui et la cervelle en marmelade. Je n’aurais jamais pu imaginé à quel point il est déstabilisant de devenir parent. À quel point cela peut renverser un quotidien...

Écrire a toujours fait partie de ma vie. Je me souviens encore à quel point le concept de "rédaction" appris au primaire a révolutionné ma vie. Si je remonte encore plus loin, je me souviens de ces frustrations épuisantes de ne pas savoir parler. Je me souviens être minuscule, à peine capable de voir par dessus la table de la cuisine, écouter s’exprimer les adultes, comprendre les mots, essayer de les répéter pour n’entendre que des charabias incompréhensibles et voir les lueurs d’interrogations dans le regards de ceux qui m’élevaient. Je me souviens de mes rages intérieures à vouloir mettre la vie en mots. Je me souviens de cette première question qui hanta ma peau d'enfant.

Après avoir passé des semaines à essayer de mettre en mots ma pensée, je finis par être satisfaite, je me lance et je demande à ma grand-mère:

- Dis pourquoi on est sur Terre?

Ma Mère-Grand de froncer les sourcils et de me répondre :

- Heu, tu demanderas à ta mère ce soir.

Reposer la même question à ma mère pour l'observer, toute aussi médusée, se dépatouiller sans succès avec ma colle et finalement me répondre.

- Tu demanderas à ta maîtresse demain.

De commencer à douter d’avoir réussi à formuler le fond de ma pensée correctement. Pourtant les mots étaient clairs. Je décide de ne pas trop m’en faire avant d’avoir vu la maîtresse. Le lendemain, j’arrive à l'avoir pour moi toute seule. Je prends mon courage de fillette à deux mains et je lui pose cette question qui m’agace. Je la vois chercher ses mots. Ne pas trop comprendre. Comme mon vocabulaire est limité, après tout je ne suis qu’en maternelle, j’ai de la difficulté à approfondir mon idée. Je lui dis que j’ai demandé la même chose à ma famille qui ne m’a pas répondu et m’a dirigée vers elle. Je voudrais juste savoir pourquoi l'on est sur la Terre. Pourquoi je suis sur Terre? Elle ne sait quoi me répondre. Je me dis que finalement les adultes ils n’en savent pas tant que cela! J’essaie au fil des mois de peaufiner ma question, de la reposer à maintes occasions avant de me résigner devant l’ignorance des adultes qui m’entourent…

Maintenant que Lily-Soleil est née, fécondée en ma chair, mise au monde par ma peau. Je me demande si c’est pour cela que l’on est sur Terre. Mais plus je tourne et retourne le sujet, plus j’ai l’impression que ce n’est qu’une facette de ma vie. La reproduction est une partie importante de notre espèce mais cela ne peut être tout ce à quoi l’on se résume! Je dois donc continuer cette quête à la source de mon humanité. Mais pour cela, je dois me détacher un peu de l’enfant. Cette solution ne coule pas de source en mon cœur.

Lorsque l’on est femme et que l’on devient mère, c’est toute notre identité qui évolue. Selon les bagages que l’on transporte avec soi, les réactions s'enclenchent. En accord avec mon passé, je me sens le devoir et la responsabilité d’être le plus présente possible dans la vie de ma fille. C’est une réaction viscérale qui défie la raison. Lorsqu’en moi jaillissent des besoins personnels, je les refrène, car s’ils impliquent l’éloignement de l’enfant, je me sens si coupable de les ressentir que je préfère les renier. C’est une émotion qui défie la raison.

Mais la raison doit arriver à s’entendre avec le cœur pour trouver un nouvel équilibre d'existence. Nous sommes des créatures de passions et d’émotions. Des créatures émotionnelles dotées d’une cervelle capable d’engendrer des merveilles. Mais il y a encore des jours où je me demande bien quel est le but de nos existences…

jeudi, janvier 11, 2007

P’tit Soleil de maison

P’tit Soleil de maison

Nonchalante, Mzelle Connerie se balade dans la maison à la recherche d’interdits. Qu'y a t-il de plus exotique par une journée aussi froide que celle-ci que le plaisir de transgresser ces divers interdits d'intérieur? Après avoir léché le bol des toilettes, essayé de noyer le téléphone dans l’eau du chien et après avoir réussi à grimper dans sa poussette de poupées pour mieux se renverser tête la première sur le plancher, Mzelle Connerie est prête à raccrocher son tablier.

J’attrape la demoiselle en pleurs et je sèche ses larmes au creux de mon épaule. J’éponge la cascade de morve qui se déverse entre deux mouchoirs et un coin de mon Tee-Shirt propre. Une fois l’accident oublié, je la pose par terre et je la regarde aller se chercher un chiffon de cuisine dans le placard pour s’en faire une cape rosée. Elle s’approche de moi et me dit :

- Kawaaïii?

J’acquiesce et lui souris le cœur rempli de tendresse maternelle. Son « chiffon-cape » sur le dos, je la regarde inspecter le tiroir de ce petit meuble qui la fascine. Elle y range quelques livres, attrape un papier, mordille un cube. Elle défait avec concentration une construction de blocs sur la table du salon et avec application érige une nouvelle structure branlante. Elle se faufile sous ma jupe pour me tâter un genou. Une caresse de petite main potelée qui fait naître un autre sourire sur mes lèvres.

Elle grimpe sur sa montagne de jouets pour mieux attraper ce qui est rangé sous le sapin. Elle se retourne et me décroche le plus coquin des sourires bambins. Je craque, incapable de gronder cette petite aventurière en herbe. Elle me chipe la télécommande sous le nez. Je la laisse faire. Elle attrape un gant de cuisine qu’elle me ramène pour que je lui enfile sur le bras. Elle s’improvise tourbillon de ménage. Elle place, déplace, replace. Mzelle Connerie se transforme en une joyeuse Miss Bordel…

Elle gazouille de plaisir en se dandinant devant moi. Une subtile odeur s'échappe de sa couche pleine. Elle n'en a cure et continue son remue-ménage. Elle trouve son peigne et en profite pour faire mine de se coiffer. Très fière d'elle, elle gargouille une suite de phrases incompréhensibles et disparaît derrière la table de cuisine. C'est le temps d'aller attraper la demoiselle pour effectuer ce devoir maternel qui ne m'inspire guère! Je la serre dans mes bras malgré l'odeur fétide qui se dégage de son popotin blindé. Je fais mine de lui croquer le cou, elle me bave sur la joue en un zeste de bisou. Une autre p'tite couche avec ça???

...

En quelques mots, je définis la Poésie des mots comme Création rythmique de la Beauté. Son seul juge est le Goût.
Edgar Allan Poe
(Extrait de The poetic principle)


De part et d'autre de votre présent si fragile, le passé et l'avenir sont des monstres assoiffés de temps.
Jean d'Ormesson
(Extrait de La Création du monde)


Le doute est père de la création.
Galilée

mercredi, janvier 10, 2007

La semaine des quatre jeudis

Expression bien connue à laquelle j'ai toujours plus ou moins préféré celle de la St-Glinglin que je trouve plus rigolote à l'oreille. En mon livre personnel la St-Glinglin est voisine de "perpète les ouilles"...

EXPRESSION
« La semaine des quatre jeudis »

SIGNIFICATION
Jamais.

ORIGINE
Cette expression existait dès la fin du XVe siècle, sous la forme 'la semaine à deux (à trois) jeudis'. Au XVIe, elle est devenue 'la semaine des trois jeudis' avant de prendre la forme d'aujourd'hui au XIXe. Elle fait allusion à une semaine, aussi impossible ou inexistante que la Saint-Glinglin, qui contiendrait deux, trois ou quatre jours identiques. Pendant la période où les enfants avaient leur jour de repos scolaire le jeudi, on y a aussi attaché le sens d'une semaine utopique, car pleine de jours de loisirs.

S’abstenir ou voter?

S’abstenir ou voter?

Une petite remarque de Moukmouk rappelle à ma mémoire le fait que je me suis inscrite à ceci. Je n’avais pas, en m’inscrivant, pleinement percuté que dans ce petit jeu de virtualité, il fallait encourager ceux qui nous lisent à voter. Je ne suis pas très à l’aise avec ce principe de « Votez pour moi ». C’est un concept qui m’insécurise la moelle épinière. De toute façon, vu le peuple qui s'y est inscrit pourquoi ne pas se laisser couler dans la foule? Ainsi, j’avais mis de coté ce concept déstabilisant, je l'avais bien rangé dans un recoin de ma cervelle rouillée jusqu’à ce commentaire de Moukmouk qui vient me gratouiller le scalp hérissé…

Me voici les idées prisent entre deux chaises, inconfortable, je me remue les fesses. D’un coté je me suis inscrite au truc (assume ma vieille!!!), et de l’autre l’idée de me promouvoir m’indispose profondément! Un petit génie qui passe par là s’arrête sur l’un des fils de mes pensées électriques. Il me dit : « Whoua, ces cordes sont bien épaisses! Y'a du super jus! Super confo! Mais dis, tu devrais pas un peu t’alléger les neurones, c'est pas un peu trop lourd ton truc là? »

Happiness

Humeur vidéo du jour

Humeur vidéo du jour


Music video "Special Cases" by Massive Attack.
Cette chanson se retrouve sur l'album "100th Window"

lundi, janvier 08, 2007

Hiver où te caches tu?

Hiver où te caches tu?

Les jours de la semaine dernière se sont confondus dans une brume fantomatique née d’une fonte précoce. Les températures anormalement hautes pour un mois de janvier rivalisent de records. Les ours deviennent insomniaques, ils se réveillent et ils errent. Les rivières ne gèlent pas et le paysage se déshabille de ses habits d’hiver pour nous entraîner dans une humide danse. Strip-tease de saison qui déçoit les touristes avides de sensations sibériennes et d'étendues polaires.

Quelque chose ne tourne pas rond. L’hiver se fait la malle, il emporte avec lui sa magie et ses complaintes, sa rudesse et ses blancheurs. Dimanche après-midi, il fait un peu plus frais, il ne pleut plus, le soleil fait une incursion inattendue et un petit gel recommence à emprisonner l’atmosphère trempée. Le lac se solidifie un peu même si personne n’ose s’aventurer sur sa traître surface. L’on annonce un retour sous zéro pour la semaine prochaine…

L’hôtel de glace
, pas encore en péril, doit ralentir sa cadence de construction. Les sculpteurs sont en congés forcés, la charpente tient le choc même si elle dégouline un petit peu sur les cotés. Durant les fêtes je suis allée signer mon nouveau contrat. À l'accueil, je découvre (avec grand plaisir) mes photos agencées en posters sous verre. Comme par le passé, je poursuis ma fonction officielle d’ambassadrice en profitant de plusieurs entrées gratuites et d’une future nuitée de glace entre autres petits privilèges de saisons, ceci en échange de mes services photographiques. C'est une belle collaboration qui anime mes hivers tranquilles.

Cette année, des produits dérivés de mes photos se retrouvent sur les tablettes de la boutique. Des crayons et des tasses décorées de mes images. Ainsi, durant une autre saison, je mettrai mon œil numérique au service de cet étrange palace. Peut-être que cette année-ci j'arriverai à aussi trouver l'inspiration glacée pour y écrire une histoire givrée. Jusqu'à sa fonte, je vais aller me plonger le coeur et les idées en ce château des merveilles hivernales qui réveille l’imaginaire gelé.

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Ces jours derniers j’étais cependant bien inquiète pour la place. Je regardais tomber la pluie avec chagrin en priant pour que cela s’arrête avant que l’hiver ne disparaisse et ne dissolve de son dépit cet hôtel qui divertit ma saison. Je grommelais dans mon coin sans oser aller voir sur place les dégâts. En ce dimanche, les rayons du soleil et le petit air frais encourage ma curiosité. J’entraîne mon homme et mon lutin pour une première visite…

Ice Kingdom

Érigé sur un océan de glace, il faut faire des petits pas prudents pour accéder à ses portes. Comme l'on a ni poussette, ni luge, l’on nous prête une sorte de petit traîneau qui rappelle ceux tirés par les chiens pour balader la petite à l'intérieur. Juan s’amuse comme un petit fou et Lily-Soleil règne dans son drôle d'engin. Les yeux bien ouverts, elle examine sagement cet étrange univers...

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La construction est encore bien inachevée. Cinq suites sont finies et une petite dizaine de chambres de base, le hall et le lounge sont ouverts, tout le reste est en attente de froid. La chapelle n’est pas accessible, le bar et la discothèque sont encore inexistants. Bref, tout n’est pas foutu, loin de là, mais un certain retard se fait sentir. L’inauguration officielle est prévue pour le 25 janvier.

Espérons que d’ici cette date, l’hiver aura repris des forces! Que ferait le carnaval sans neige? L’année dernière déjà, l’hiver faisait la gueule, ici il faisait déjà trop chaud et l’inauguration de l’hôtel avait dû être repoussée d’une semaine pour que tout soit prêt à temps. Ce serait quand même étonnant de se dire que l’on ne peut plus compter sur l’hiver au Québec! D'ailleurs en ce lundi voilé la neige n'en finit plus de tomber...

En attendant la suite givrée de janvier, un petit aperçu du royaume des glaces qui se cache de l’autre coté du grand lac…

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Embuée

Au petit jour...

Je me réveille la première. Je me décolle les paupières lourdes de sommeil pour aller me chercher un verre d’eau. En entrant dans la cuisine, je crois distinguer un mouvement près de la fenêtre. Je me secoue les puces. Un autre matin blafard pointe derrière la vitre. Depuis quelques jours, une épaisse brume embrouille les paysages. Je baille. Je crois voir quelque chose bouger dans le salon. Sûrement un chat qui s’étire. Je sors un verre du placard. Furtivement, il me semble apercevoir une silhouette se déplacer sur le balcon. Je fronce des sourcils et m’approche de la fenêtre. Dehors, le brouillard alourdit l’atmosphère, tout est calme et silencieux.

Je me frotte les yeux et tourne le robinet pour laisser couler l’eau fraîche dans mon verre. J’entends l’homme ronfler dans la chambre. Le bébé dort encore. Alors que je prends une gorgée d’eau fraîche, quelque chose remue à ma droite. Je tourne la tête juste à temps pour distinguer une bouffée de brume s’effacer de la chaise. Je fronce les sourcils, indécise, est-ce que je suis moins bien réveillée que j’en ai l’impression? La brume existe dehors jamais à l’intérieur! Je m’approche de la baie vitrée pour examiner les environs. Une purée de pois recouvre la rue. Elle lèche le balcon de sa grisaille. Quelque chose bouge sur les escaliers. Quelque chose qui se fond rapidement dans la brume. Dans le salon, un chat siffle et grogne.

J’entre dans la pièce pour y découvrir une masse informe sur le divan. Une entité de vapeur flotte sur le tissu. J’avale de travers et m’arrête net. Gelée dans mes mouvements, je me colle le dos contre le mur. La masse se forme et déforme jusqu’à ressembler à une personne. Mon cœur bat la chamade. Sans me prêter attention, la chose sans consistance s’approche de la fenêtre. Elle la traverse sans un bruit et paraît marcher vers le brouillard. Elle y disparaît en deux secondes. J’ose prendre une grande respiration. Peut-être que je dors encore et que je suis en train de rêver que je suis réveillée? J’entends battre mon cœur dans mes veines. L’instant présent possède la texture du réel mais je n’en comprends pas la saveur. J’ai à peine repris mes esprits que je distingue une autre de ces formes assise sur une chaise de jardin oubliée dans un coin de balcon. Elle tourne sa tête sans visage en ma direction. Je manque de défaillir. Un cri s’étouffe entre mes lèvres. Je traverse la cuisine au pas de course pour me réfugier dans la chaleur de mes draps…

Mais qu’est-ce que c’est que cette histoire? Et bien voilà, c’est juste cela! Juste une minuscule histoire de vapeur matinale, rien qu’un soupçon de fiction jaillit d’un concept confus: Et si les lecteurs de blogues pouvaient, grâce au pouvoir des mots, se matérialiser dans notre réel? Et si les esprits inconnus qui lisent ces phrases offertes aux regards de tous pouvaient se téléporter l’essence en nos maisons cachées? À quoi ressembleraient nos petits matins embrumés si l’on avait le pouvoir de croiser ces personnes invisibles qui viennent butiner notre virtualité?

Allo?

Coup de fil.

Le téléphone sonne. Juan donne le bain à Lilou, je réponds.

- Allo?
- Étolane, vous avez laissé un message pour le service de garde?
- Heu, oui, je voulais avoir un peu plus d’information, j’ai une petite fille de 14 mois et j’ai vu trouvé l’une de vos cartes, j’habite sur la « … », j’ai vu que vous n’étiez pas loin…
- Oh! Mais je vous reconnais, l’on s’est déjà rencontré, je crois que l’on s’était parlé à la plage, on était toutes les deux enceintes…
- Ah! Oui? Heu, c’est possible…


Mais qu’est-ce que je rencontre de personnes à la plage!!! Et bien sur comme ce sont à chaque fois des rencontres furtivement amicales, je ne me souviens jamais des gens. C’est que j’en rencontre des gens dans ma vie! J'ai besoin de voir plusieurs fois un visage avant de me le rentrer dans la tête. Ceci mon plus grand paradoxe, je suis instinctivement solitaire mais dès que je sors le nez de ma tanière je butine à qui mieux mieux l’humanité que je croise! à mesure que l’on se parle, la dame me replace. C’est sympathique, ceci amène un ton bien cordial même si je n’ai personnellement aucun souvenir de cette dame. Plus je lui parle et plus je me rends compte qu’elle semble parfaite...

Elle habite à quelques centaines de mètres de chez moi. Mère de deux enfants âgés de trois et un an, elle est en train de monter une petite garderie familiale accréditée par le gouvernement. Elle travaille déjà dans une grosse garderie en ville. Pour l’instant elle n’est disponible que deux jours par semaine mais est prête à prendre Lily-Soleil selon ma convenance que ce soit une heure ou une journée. Étonnement flexible et compréhensive, elle possède une expérience professionnelle adéquate et l’envie donner un service qui n’existe pas au lac. Il faut dire que nous sommes à peine 500 habitants à l’année, même si l’on passe à cinq mille l’été, l’été ne dure que trois mois par année! Pour l’instant à part ses deux enfants, elle garde occasionnellement une autre petite fille. Comme elle désire être accréditée par le gouvernement pour offrir des places à 7 dollars la journée, elle doit prouver qu’elle peut avoir une clientèle.

Elle aimerait quitter sa job en ville pour ouvrir à temps plein son service de garde en septembre. Il paraît qu’il y a pas mal de femmes enceintes dans les environs, elle a bon espoir que cela marche. Le Québec connaît un mini baby boom qui est en train de bousculer les mœurs des dernières années, c’est le miracle inattendu des nouvelles naissances. Elle m’explique même que si je décide d’envoyer Lily durant une journée entière, son tarif privé de 26 dollars ne me coûtera que 11$ car je peux être remboursée par le gouvernement et qu’elle a, en sa possession, les papiers pour que j’applique à ce remboursement. Bref, elle est parfaite. Mon cœur se serre, mon estomac fait des noeuds. Je lui propose de passer la voir la semaine prochaine avec le bébé, juste pour voir…

Elle me rassure et m’explique combien il est normal que je ne désire pas me détacher de mon enfant, en plus c'est le premier me dit-elle! Elle-même se lance dans l’aventure pour rester près de ses enfants et leur donner l’occasion de socialiser avec d’autres. Oh! Ironie quand tu nous tiens! Son fils n’a que deux mois de différence avec Lily-Soleil. Je raccroche en promettant de passer la semaine prochaine. Je pose l’appareil sur son socle et je prends ma toute petite fille dans mes bras. Je la serre fort. Elle se laisse faire. Juan est fier. Il sait combien cela m’a coûté que de faire ces premiers pas. Dans un tout petit coin de ma cervelle, une petite ampoule éclaire une aire de traduction. L’idée fait son chemin, insidieuse, elle me prépare les fesses à reprendre des contrats l’automne prochain…

mercredi, janvier 03, 2007

Conjuguer la femme et la mère

Conjuguer la femme et la mère n'est pas une mince affaire! Depuis la sortie de cet essai, un nouveau débat prend forme...

Extrait via cet article: "Le point de vue de Nathalie Collard sur...

Le féminisme: « Le féminisme aborde rarement la maternité. Lorsqu'il le fait, c'est pour parler d’avortement et du droit à disposer de son corps. Je crois qu'il est grand temps de se questionner sur notre rôle de femme et de mère, et de cesser de percevoir la maternité comme un piège. La maternité vient avec des responsabilités et un retrait de la vie active. Les premiers mois, c’est la maman qui s’occupe du bébé, que l'on soit féministe ou pas. Il est faux de croire que la journée suivant l'accouchement, on peut retourner travailler et continuer sa vie comme si de rien n’était. C'est certain que mettre son enfant trop tôt en garderie entraîne des impacts négatifs. Pourtant, on refuse de regarder cette réalité en face et d’envisager des solutions. Le sacrifice même pour la mère de rester avec son enfant durant la première année ? et pour le papa les six mois suivants ? apparaît insurmontable. Si nous ne sommes pas prêts à cela, alors n’ayons pas d’enfant !

La génération X, celle dont je fais partie, est éloquente : nous étions certaines de pouvoir tout réaliser ? des études poussées, une brillante carrière, une vie de couple épanouie hors mariage... Jamais personne ne nous a dit que le fait d'avoir des enfants impliquerait un arrêt de travail temporaire, une perte de repères. Nous éprouvons toutes les misères du monde à réconcilier notre vie de femme autonome et notre maternité. Il existe actuellement une compétition malsaine entre les femmes qui travaillent et celles qui font le choix de rester à la maison pour s'occuper de leurs enfants. Les secondes sont souvent méprisées par les premières. Tant mieux si ces femmes peuvent se le permettre ! S’il y a un échec dans le féminisme, il se situe à ce niveau, bien plus que dans le phénomène de l’hypersexualisation des fillettes.

Tout ce que l'on fait maintenant, c’est de rassurer notre employeur et notre entourage en leur disant : “Je n’ai pas changé parce que j’ai eu des enfants”. Sur le plan physique, on va se dépêcher de retrouver sa taille. C'est comme si c’était une tare d’avoir des enfants. »"

Brouillon mental

Brouillon mental

Premiers mots de 2007. Retour devant la machine infernale. Avec bonheur, je me suis éloignée de la bête informatique. Laissant rejaillir à la surface de mes souvenirs ces années d’existence sans la Toile invisible pour nous emporter les heures. J’ai dévoré quelques livres. Et surtout, je me suis baignée dans cette lumière amoureuse qui s’allume tendrement lorsque nous sommes ensemble. Cela faisait si longtemps que je n’avais pas passé autant de temps avec lui...

Son emploi à l’université ne lui offre pour l’instant qu’un simple salaire, pas de congés payés, pas de congés maladie, pas d’assurances, juste l’occasion de faire ses preuves. Huit jours fériés par année et au bout de deux à trois ans, l’opportunité de décrocher une permanence avec congés payés et ribambelle de conditions sociales. En attendant, il pointe au bureau et travaille sans relâche. De mon coté, j’apprivoise mon rôle de mère au quotidien et plusieurs soirs par semaine alors qu’il rentre du bureau et prend le relais parental, je vais fouetter ce corps ingrat qui m’a si lâchement laissé tomber en le torturant vigoureusement dans une salle d’entraînement uniquement peuplée de femelles en sueurs.

Nous ne nous voyons plus que les fins de semaines. En bientôt sept ans de cohabitation, c’est la première fois que nous nous voyons si peu. Nous en sommes conscients, nous en discutons régulièrement. Le secret de la réussite présente de notre couple tient dans cette communication fluide qui nous balance. Car comme dans tout couple, parfois les regards grincent, parfois les portes claquent, parfois les mots piquent. Les courants des humeurs qui nous parcourent s’entrechoquent, s’emboîtent, s’adaptent et puis s’harmonisent. En sa compagnie, chacune de mes émotions est valide, nul besoin de les cacher, nul besoin de faire semblant, avec lui, je suis entière. Malgré cela, il nous aura fallu deux trois jours pour retrouver nos repères, deux trois jours pour rééquilibrer ce quotidien qui d’habitude nous fait défaut. Comme toujours le pouvoir de communiquer le fond de nos pensées nous a sauvé du pire pour nous guider vers ces voies de compréhensions mutuelles essentielles à notre bonne entente. Nous sommes sortis chez des amis, nous avons reçu la famille, nous nous sommes reposés, nous sommes partis pour de longues ballades sur le lac, dans la poudreuse qui scintillait de mille feux sous un soleil polaire. Même le temps s’est accordé avec les beautés de l’hiver pour nous offrir une symbolique bordée de neige le 26 décembre. De la neige douce, aérienne, qui s'est offerte à de merveilleuses journées, bien froides mais si ensoleillées!

La petite était ravie de passer du temps avec nous deux. Les trois, ensemble. Si jolie à voir grandir, elle a commencé l’année avec un moral nullement affecté par ce premier rhume attrapé à Noël ou par cette petite larme qui lui gela un minuscule bout de peau exposée à l'hiver retrouvé. Sans trop comprendre le principe des fêtes, ses grands yeux bleus ont brillé à mesure que les jouets lui pleuvaient entre les mains. Petite boule de sourire, de plus en plus rigolote, de plus en plus coquine. Les premiers jours, Juan a dû subir le « papa-scotchage » qui consiste à ce qu’elle le colle avec tant d’ardeur et de volonté qu’il ne peut faire deux pas sans l’avoir accrochée à une jambe. Elle ne semble pas souffrir de ce problème avec ma pomme qu’elle voit à satiété. Au bout d’une semaine ensemble, ce symptôme à saveur « Œdipienne » semblait être passé. Il rejaillira sûrement au cours des prochaines semaines. C’est le revers de la médaille du père qui fait de son mieux pour s’occuper de sa toute petite fille tout en continuant le dur labeur de sa vie professionnelle. Au détour d’une conversation, l’on remarque comment les circonstances de la vie rendent la paternité si empreinte d’absences.

Pour Lily-Soleil qui adore son père, les heures en sa présence sont trop courtes, trop rares, elle en veut plus. Il le sent, je le vois, elle l’exprime. C’est ainsi. Presque étrange pour moi qui n'ai pas de souvenirs paternels. Je trouve que Juan est bien présent dans la vie de son enfant. Cela me cicatrise de l’intérieur. Je n’ai pas grandi avec le manque paternel, mais j’ai connu ce manque maternel qui m'a construite. Je suis issue d'une famille dysfonctionnelle. Au fond, tout ce que je désire c'est savourer le bon fonctionnement de cette jeune famille que nous construisons au fil des années qui s'effacent. Je suis le fruit insouciant du mariage éclair de deux adolescents en rut. Ma mère, une femme de sa génération avec des ambitions d’indépendance exacerbées a mené sa vie tambour battant. Élevée dans les jupons de ma grand-mère, je voyais tourbillonner ma mère, jeune, belle, libre et je sentais cet insaisissable manque me grignoter le fond du ventre. Ainsi était ma vie. Désormais, je dois confronter ce traumatisme d’enfance en acceptant en mon cœur que je ne peux passer chaque seconde de mes jours avec Lily même si j'en ressens le devoir. Que je dois aussi vivre une vie qui est mienne. C’est une réalité qui me déchire. Je suis capable de l’envoyer passer une journée ou une nuit chez ma mère car c’est sa grand-mère et qu'à travers elle, j’y retrouve peut-être ce que je n’ai pas connu.

L’idée de la gardienne me fout à l’envers. Je bloque sec. Depuis des semaines, Juan essaie de planter des graines de raisons dans ma petite tête pour me décoller de ces puissantes émotions internes, je le laisse faire, je les laisse germer. J’apprivoise sans joie l’idée de la garderie. Viscéralement, je veux la garder encore un temps près de moi. Je veux continuer d'apprendre à la connaitre. Je me rebelle. Est-ce si grave de laisser mon individualité de coté pour encadrer ses jeunes jours? Est-ce si grave si notre pouvoir d'achat est faible? Parfois je ne fais que la regarder grandir et le temps s'arrête. Je fonds de bonheur. Je suis là où je dois être. Je me sens riche. Je la guide. Chaque jour davantage, j'aime être sa maman...

Je sais que le jour viendra où elle ira à l’école. J’ai d’ailleurs laissé tomber le fantasme de lui faire l’école à la maison, car soyons franche, j’aime quand même bien l’idée d’avoir une vie indépendante de mon rôle de mère et si j'avais dû être institutrice, j'aurais passé ces portes qui se sont ouvertes maintes fois vers cette voie alors que je piétinais le chemin de mes destinées. Je sais que pour reprendre les rennes d’une certaine individualité, je dois laisser d’autres personnes s’occuper de mon enfant vu que je n’ai pas les huit bras, quatre bouches et trois cerveaux qui me permettraient de tout faire à la fois. J'ai du mal à accepter cette idée...

J’envisage malgré tout avec cette nouvelle année l’option de la laisser quelques heures par semaine en garderie familiale. C’est à reculons que j’envisage cette option, poussée dans le dos par mon homme qui, je le sais, ne veut que le meilleur pour ma pomme. Mais encore faut-il trouver LA garderie! Je suis en paix avec l’idée qu’elle passe une journée par semaine chez sa grand-mère, je suis heureuse qu’elle ait ainsi l’occasion de développer une relation approfondie avec l’un de ses grands-parents. Mais sa grand-mère n'est pas toujours disponible alors il faut aussi avoir un plan B. Je comprends le principe.

Pour faire preuve de bonne foi ou est-ce les graines de l'homme plantées dans mon cerveau? Le fait est que je n’ai pas tourné la tête lorsque j’ai vu sur les babillards des commerces du village voisin les cartes pour la promotion d’une garderie familiale à trois rues de chez moi. J'ai pris l'un de ces cartes dans ma poche. Malgré mon estomac serré en des nœuds bien raides, ce matin, j’ai appelé et laissé un message pour avoir plus d’informations. Rien qu'écrire ceci m’inonde d’angoisses sombres. Je suis bloquée à la gorge. C’est une évidence. Plus je passe de temps avec ma fille, plus il m'est difficile de m'en détacher. Elle m'accroche le coeur. J'aime tant ces moments privilégiés que nous passons ensemble.Du coin de l'oeil, j’observe de loin le débat qui entoure ce livre (que je n'ai pas lu par crainte de m'y perdre!) qui me conforte dans mon « blocage ». Je me sais incapable de l’envoyer en garderie avant ses 18 mois. Je sais cependant qu’elle va bientôt avoir besoin de socialiser avec d’autres enfants, c’est l'unique point qui fait pencher ma balance. Je ne tiens pas à l'enfermer dans un vase clos en ma seule compagnie. Elle aura 14 mois dans quelques jours…

Si je pouvais me contenter de n’être qu’une mère au foyer, je serais au paradis des femmes comblées. Mais je ne me rends compte que je ne peux désirer n’être qu’une mère pour le restant de ma vie. J’ai aussi besoin d’exister en tant que femme, en tant que personne individuelle. Même si je m'en écarte souvent, je vis dans une société enrobée de consommations, une société basée sur des règles individualistes. Il est difficile de renier le monde qui m'entoure. Je réalise la profondeur des dilemmes qui affligent la "femme-mère". De nos jours, les femmes sont libres d'être ce qu'elles désirent être. Nos mères ont repoussé les limites permises, elles se sont battues pour l'égalité des sexes et c'est pour le mieux! Les réalités féminines se sont, au fil des générations, doucement transformées de façon à laisser éclore les individualités. Maintenant, chacune d'entre nous doit trouver son propre équilibre au sein de ces nouvelles libertés. En cet équilibre se cachent bien des défis...

Faire un enfant a changé bien des choses dans ma vie, dans mon esprit, dans mon corps et dans mon cœur mais mon âme est restée intacte. Et mon âme se nourrit de mots et de langues, elle en a besoin tout comme l'humain a besoin d’air pour respirer. Il est temps avec cette nouvelle année de retrouver le chemin des mots disciplinés et de discipliner les émotions embrouillées…

Étincelles...

Étincelles humaines

Après s'être levée de fort mauvaise humeur, elle s'est réfugiée au creux de ses draps tandis qu'il adoucissait son monde extérieur d'attentions aimantes. Pas de cadeau à déballer juste un homme pour l'aimer. Elle s'occupe de l'enfant enjouée pour essayer de souffler la morosité de son humeur. Il l'entoure de petits soins. Elle se laisse amadouer. Il réchauffe ses idées glaciales. La journée se passe dans le calme.

Tombe la première nuit de la nouvelle année. L’enfant s’est sagement endormi. Une douce quiétude règne dans la petite maison située à la lisière de la grande forêt assoupie par les forces de Janvier.

Il grignote au coin de la table, elle lève le nez de son livre et pénètre l’atmosphère tranquille pour lui demander :

- Pis pour toi la nouvelle année ça t’inspire quoi finalement?

Il réfléchit quelques secondes avant de répondre

- Ben, la vie c’est pas ce que l’on croit…
- Hum? Hein?!?
- Oui, dans le fond on est rien que des étincelles de néant dans l’éternité…
- Aaaah! Hummm…

Elle croque ses mots et sourit sans mot dire. Elle tourne une page qui bruisse entre ses doigts et poursuit sa lecture. En son cœur de femme, une étincelle de passion fait briller la pénombre de ses silences. Après tout, avoir 34 ans, cela ne veut pas dire grand chose! Ce qui compte c'est le coeur qui palpite de bonheur et la vie qui s'écoule en nos veines...