jeudi, avril 02, 2020

Troisième semaine d'isolation volontaire en coin de brousse

Chroniques de confinement



Troisième semaine d'isolation volontaire en coin de brousse. La vie continue...

L'homme s'adapte au télétravail et l'on s'adapte tous à la situation. On réfléchit ensemble sur comment s'accorder au mieux. Quand l'un tape sur les nerfs de l'autre, on communique et on réajuste. Chacun fait des efforts pour trouver le meilleur équilibre et mettre en place un nouveau rythme de vie.

Miss Soleil nous raconte un rêve qu'elle a fait hier. Elle vivait le voyage de fin d'année à NY qu'ils auraient dû faire dans 3 semaines. Elle vivait ces émotions qu'ils ne vivront pas. Être à Times Square avec ses amis, s'amuser dans le bus, etc. Et puis de la tristesse de réaliser que cela n'arrivera jamais.

En son école de campagne, ils sont 90 secondaires sur quatre classes de deux niveaux. Cette année était la dernière en cette école où elle va depuis la maternelle. L'année prochaine, tous les élèves iront dans des écoles en ville. Ils vivent un peu les émotions des secondaire 5. C'étaient les finissants de cette école. Et j'attends toujours un signe de vie de la part de la directrice...



Classe virtuelle en progression

Même si cela me fatigue, faire la classe de brousse avec ce petit groupe de filles est ma contribution bénévole à leur cause. C'est leur offrir deux repères temporels, chaque semaine, qui leur rappellent leur quotidien scolaire. C'est leur offrir un temps de socialisation où se retrouver, c'est leur permettre de vivre ensemble une activité éducative. C'est m'excuser du tort que leur font les adultes insouciants que nous sommes.

Je suis autant choquée par la non continuité de l'éducation des jeunes durant cette crise que je suis frustrée de la non continuation des soins de santé.

En faisant quelques recherches sur les cours à distance avec Zoom, je comprends qu'un groupe de trois ou quatre élèves est le meilleur format pour un bon apprentissage. En notre petit groupe de secondaire 2, elles sont trois. Et elles n'ont guère envie d'être plus.

Elles m'expliquent que plus ce serait trop, elles ne travailleraient pas si bien, on aurait moins de temps, etc. J'avoue trouver cute cette complicité qu'elle tissent au travers cette expérience virtuelle. À date, en cette deuxième semaine de classe de brousse, l'on étudie les lundis et les jeudis après-midis.

Lundi, j'étais partie pour 1:30 de français. Mais elles ont si bien travaillé qu'au final cela a duré trois heures. Et elles étaient contentes. Cela m'a fait plaisir même si cela m'a brûlée en chemin. C'est pour la bonne cause. Celle du futur que l'on façonne.

La fatigue éprouvée m'a rappelée ces années universitaires où je donnais des cours de soutien scolaire aux enfants en difficulté, de cette même école, où allait la Miss jusqu’à la pandémie. Il y a trois directeurs de cela. Au début des années 2000...

L'un de ces élèves, auquel je me suis attachée (trois fois semaine, durant 7 ans) était un petit Asperger. En ses mauvais jours il pouvait m'aspirer un max d'énergie, j'étais vidée pour trois. Et je n'avais plus qu'à aller me coucher! Mais devenu grand, il est capable d'écrire un français qui me rend fière.

Avec l'école de brousse, je n'ai que des élèves motivées, mais j'avoue que trois à le fois pendant trois heures, ça vide. Déjà que mon énergie vitale est pas top shape! Les filles aussi étaient fatiguées. Mais en la puissance de leur jeunesse, elles étaient aussi stimulées et satisfaites. Prêtes pour en prendre plus!

Je les laisse en leur donnant un devoir à me rendre le jeudi midi. Le mardi soir, elles l'ont fait. J'hallucine un peu. J'en parle avec Miss Soleil qui m'explique que cela leur fait du bien d'avoir des devoirs à rendre, cela les fait se sentir moins perdues. Okay alors, ça vaut bien une fatigue de vieille mère...


Pandémie et rééducation physique ne font pas la paire

Me forcer à la marche quotidienne est une nouvelle torture physique. Sentir le mécontentement de mon dos qui ne comprend pas où est passée la piscine. Pourquoi tant de pesanteur? Pourquoi si peu traitements? Il n'est pas content.

Pour la première fois depuis trois ans, réussir à faire le tour de mon quartier. Puis accuser l'après-coup qui cimente les muscles contractés. En espérant qu'ils ne crispent pas assez pour me déplacer une vertèbre. Le plus gros stress que m'apporte cette pandémie est au niveau de la continuité de mes soins médicaux. Le chiro est de plus en plus difficile à joindre. C'était mon dernier ancrage en ce processus de rééducation physique, qui en prend pour son grade.

Comme la majorité de ceux qui étaient déjà malades avant le confinement, je me retrouve abandonnée à mon sort. Et c'est bien frustrant! Je m'adapte et je m'ajuste au maximum pour essayer de sauver les meubles. Pour ne pas régresser. Pour éviter de redonner de la force à ses douleurs physiques que je m'évertue à dépasser. J'y étais presque. Mais pas. Heureusement que je suis de nature autonome et rebelle. Je compte bien ne pas me laisser abattre par l'augmentation de certaines douleurs!


La sensation d'être un parent choyé

Après la fatigue de la classe. Recevoir notre salaire de parent le soir venu. La puce nous explique qu'elle a décidé de nous préparer le souper. Avec un petit mot doux et un dessert surprise. On se sent choyés et aimés...

Elle nous explique qu'elle ne voit pas ses journées passer tant elles sont remplies. Ce qui me fait penser que ma mission de maman est accomplie. Une mission quotidienne à laquelle je m'atelle...

Avec une pensée émue pour la tranche, un peu oubliée, des 13/17 ans qui ne pourront vivre ces expériences de vie qui façonnent le développement de soi. En leur souhaitant à tous qu'il en résulte un meilleur futur pour leurs vies adultes...

Avant d'aller se coucher, Miss Soleil nous demande:

- Cela fait combien de temps qu'on est confinés maintenant? 
- Ben c'est notre troisième semaine... 
- Alors ça veut dire qu'on a pas le coronavirus? 

En effet, cela veut dire cela. Et quelqu'en soient les difficultés, l'on fera notre possible pour continuer sur cette lancée...

1 commentaire:

  1. C’est chouette le blog. Vive le blog et tes beaux témoignages.

    RépondreSupprimer