Je discute beaucoup avec M'zelle Soleil même si par moment je me sens encore en mode adaptation. Il me semble qu'il y a si peu de temps, ma relation avec elle avait des airs de monologues sur fond de babillage!
Et l'époque où je décryptais sa langue bambine me parait encore si proche. Maintenant, de plus en plus souvent, je cherche les mots qu'elle accroche encore. Sans parler de ses structures de phrases qui m'impressionnent régulièrement. Enfin, ce soir, j'ai eu droit à "bébélothéque" pour bibliothèque. J'en étais presque émue. Les enfants évoluent si vite. À peine a-t-on le temps de maitriser une routine d'enfance qu'une autre s'enclenche...
Désormais M'zelle Soleil converse à gogo. Ce n'est plus du tout un petit chose dont il faut prendre soin à toutes les heures. Autonome de sa personne, c'est aujourd'hui un petit esprit qu'il nous faut apprendre à guider. En fait, c'est aussi neuf et fragile que pouvait l'être le petit bébé qui ne savait pas marcher ni parler. Mais c'est plus abstrait. Si elle sait désormais penser, elle est encore un grand livre vierge. Et maintenant qu'elle réfléchit davantage, elle commence à écrire les premières lignes de sa vie.
Je sais que c'est vers l'âge de six ans que les enfants commencent à réellement faire la différence entre le réel et l'imaginaire. À quatre ans, l'imaginaire fait partie intégrante du réel. J'adore ça. Ses jeux se déroulent entre ces deux dimensions qui s'imprègnent l'une de l'autre. Et c'est ainsi que naissent de drôles d'histoires qui se déroulent par exemple dans des magasins à maris! La frontière entre le réel et l'imaginaire et si fine que l'on peut parfois l'oublier...
Il m'arrive même d'en jouer. Je l'entraine alors dans quelques féeries qui me rappellent à mon propre imaginaire. Cela me ressource aussi. Car au fur et à mesure que ses compréhensions humaines prendront forme, l'imaginaire laissera la place au réel. Une fois devenue grande, j'espère cependant qu'elle pourra garder un bel équilibre entre ces deux états d'esprits.
M'zelle Soleil est ultra féminine, coquette, elle s'intéresse à l'Amour de manière prononcée. Les princes débarquent dans son monde de princesses et la séduction qu'elle fait à son père est à tomber par terre! Celui-ci doit d'ailleurs régulièrement remettre les choses à leur place, dans le bon ordre: "Non, je ne suis pas ton mari, ni ton amoureux, je suis ton papa. C'est tout et c'est déjà beaucoup!"
Et la demoiselle de nous expliquer que ce n'est pas juste si elle n'a pas de maris et de nous inventer un monde bizarre où il existe des magasins à maris! Ce que j'ai du mal à comprendre c'est que tous les maris qui se vendent en ces fameux magasins sont violents! Lorsqu'elle m'explique sérieusement que tous les maris en magasin battent leur femme, je fronce des sourcils. Je ne sais quoi en penser. Je me gratouille la cervelle. Je cherche une porte de sortie rosée. Et puis, un autre soir, elle me demande:
- Maman, taper sa femme c'est une grosse bêtise hein?
- Heu oui, ceux qui le font vont en prison. Mais où tu as vu des hommes qui battaient leur femme?
Elle hausse les épaules d'un air indifférent et me répond:
- Ze sais pas! Ze l'ai inventé toute seule!
Alors je réalise qu'elle est arrivée à un âge où elle sait s'inventer de bonnes histoires fictives. Toute seule. En sa tête de fillette toutes sortes d'idées naissent et s'emballent. Elle s'invente des histoires pour s'amuser et d'autres pour se faire frissonner. C'est la vie. Cela me fascine. Je l'écoute. Je l'observe. Je prends un certain recul. Et je me dis qu'il serait peut-être temps que je retrouve le fil de mes propres fictions...
Bonjour !
RépondreSupprimerDepuis que je me suis abonné au fil RSS de ton blog, je ne manque pas un seul billet et quel plaisir de te lire !
J'ai adoré particulièrement ce dernier billet.
Merci de partager !
Quelle imagination !!!
RépondreSupprimer"mais où va-t-elle chercher tout cela?"
L'enfance c'est un peu un rêve éveillé, où l'on prend des bouts d'histoire, de réalité que l'on arrange à notre gré !
Juan, d'ailleurs tu es le premier Juan que je rencontre ici. Merci beaucoup de ce commentaire qui me fait chaud au coeur...
RépondreSupprimerBlandine, le pouvoir de l'imaginaire est étonnant. Sur ce coup là, elle m'a bluffée. Des fois, je me demande si c'est pas des trucs qu'ils se racontent à la garderie. En tout cas, ce qu'il y a de sur c'est qu'elle a l'imaginaire en pleine forme! D'un autre coté, elle saura depuis son plus jeune âge qu'il n'est pas permis pour un homme de battre sa femme...
Elle a aussi des petits trips de prison. La police l'intrigue beaucoup. Elle se cherche des méchants...
Oui c'est vrai comme un rêve éveillé où la magie existe sans que l'on se pose de questions.