mardi, octobre 10, 2006

Survol de réel

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Survol de réel

Sur plusieurs jours gris, l’automne monotone effile ses jours voilés. La pluie intermittente alourdit les feuilles colorées que les coups de vents font tomber, une douce mélancolie de saison flotte entre deux averses.

Je materne mon petit Soleil sur pattes. Si mon p’tit bout fait des un ou deux petits pas toute seule peut-on considérer qu’elle marche ? Lorsqu’elle n’y pense pas, qu’elle est occupée avec quelque chose dans les mains, alors elle fait des petits pas toute seule comme une grande ! Elle parle aux animaux, elle possède deux sortes de "parlure" une pour le chien ou une autre pour le chat. Lorsqu’elle leur raconte sa vie, le chat la regarde de ses gros yeux ahuris: "Heu c’est du lard ou du cochon ton truc ?" Elle lui rigole au nez et continue son discours aux sonorités aiguës tandis qu’il lui tourne le dos pour essayer de se rendormir. Le chien se défile et se trouve un petit coin où se faire oublier.

Dans mon salon, une p’tite puce qui se trémousse sur des airs de hip-hop. L’on n’écoute que trés peu de musique enfantine toutes les deux. En fait, elle écoute plutôt les musiques qui se déroulent selon mes humeurs du jour. Elle s'imprègne de toute une panoplie de saveurs musicales. Parfois je me demande si je ne suis pas une mère indigne à ne pas vouloir ainsi plier mes oreilles mais plutôt exercer les siennes ?

Dites donc c’est quoi la job d’un bambin ? Ben foutre le bordel voyons!

Je la regarde se mettre debout, capte son regard et lui dit :

- Tu sautes ?

Il n’en faut pas moins pour qu’elle sautille sur ses petites pattes, en équilibre précaire, super fière ! Elle me fait craquer le cœur ! M’zelle Soleil rêve de grimper, les hauteurs l’attirent elle s’accroche à tout ce qu’elle peut trouver. Elle lève les pieds, essaie de s’agripper, c'est un défi permanent. Je suis présentement en train de me faire pousser des yeux dans le dos pour la suivre du regard lorsqu’elle file comme l’éclair pour aller examiner l’un des quatre coins de la maison. Elle a encore la marche hésitante mais gambade librement à quatre pattes. De plus en plus autonome, aventurière, téméraire, elle se construit avec le temps qui passe, bientôt une année d’existence…

Enfin la saison se dévoile et le soleil apporte en son sein l’été indien ! Les journées sont magnifiques de nature en fête. Les couleurs des arbres enchantent, subliment, elles vibrent de milliers de sensations fugaces dignes de cet unique paradis automnal.

Micah et Jibé débarque en notre auberge. Notre auberge n’a qu’un seul thème: rétro. Une suite modeste nommée Loft Vintage et une petite chambre avec un lit simple imaginée par Petite Clo. Le tout avec cable sur Tv rétro, toilettes et salle de Gym ! Plutôt confortable dans son style, sous nos pieds, le Loft Vintage accueille un ami d’adolescence de Juan et l’un des amis d’université dudit copain. Micah, témoin de l’homme à notre premier mariage à Besançon, il y a six ans de cela. Jibé, jeune homme en année plus ou moins sabbatique au Canada. Juan et Micah retrouvent leurs marques masculines, un petit groupe se forme. L’auberge familiale est en plein éveil.

Tadoussac-Octobre

Bébé Soleil passe quelques jours chez sa Mère-Grand en ville et l’on file dans l’horizon du grand St-Laurent. Une petite fuite dans la douceur de Tadoussac, une impression de voyage qui enivre les idées et le corps. Pour la première fois depuis presque vingt ans que je suis ici, enfin l’occasion de découvrir les baleines. L’occasion de voguer quelques instants sur le grand fleuve majestueux, solennel, authentique. Le St-Laurent dans toute sa splendeur, nature à l’état pur, le rêve limpide…

Reflets-de-St-Laurent

Apercevoir quelques baleines, sentir son corps s’arquer en leur direction, envie de communier avec la pureté qui se dégage de cet moment précis. Cette dernière année a exacerbé mes sensibilités, je le constate une fois de plus lorsque mon regard s’embue d’émotions à la vision de ces étonnantes créatures. L’air du large s’engouffre dans mes poumons. Je me perds dans la toute puissance du présent. Savourer. Simplement. Dans l’émotion de l’instant, j’oublie cette humanité qui m’entoure, j’oublie le troupeau de touristes qui me colle, j’oublie la menace humaine et je me fonds dans cette beauté naturelle qui m’absorbe toute entière. Des taches blanches de bélugas dans le Fjord et le voyage s'achéve avec une gaufre au sirop d'érable à la terrasse du café la Bohème. Sous la lune rousse qui se mire dans le St-Laurent, l'on reprend la route...

Le lendemain c’est direction Wendake avec bébé. Une petite visite du site historique des Hurons, la tribu amérindienne urbaine de Québec. Les Hurons qui, depuis trois cent ans, évoluent au rythme de la ville qui les englobe. Comme toujours cette même tristesse qui m’emporte devant ce passé décimé. Mélancolie teintée de cette douce sérénité intérieure qui surgit à chaque fois que je me plonge dans les entrailles de ces peuples natifs de ce continent qui me voit vivre. Je trouve sur le site historique une liane de sauge tressée que je m'empresse de rapporter. Bouffées de sacré...

Avec Micah, nous goûtons tous les deux pour la première fois à un burger au Caribou, je lui demande :

- Tu trouves pas ça super goutu?
- Ouais, c’est pas mal fort comme viande ! On sent bien le gibier…
- Indeed, mais c’est la forêt qui m’étonne le plus.
- Hein ? Tu sens la forêt dans la viande ?
- Ben oui, pas toi ?!?
- Heu, non moi, je sens pas la forêt…

Ballade-d'automneLe-retour-de-Pierre

Entre sourires, réminiscences, rigolades et reconnaissances, les jours s’effacent. Les années ont passé, la vie a évolué mais l’amitié reste intacte. L’on rentre se coucher en notre cocon de maison. Ce matin, Juan reprend le chemin du bureau et les invités partent faire un tour de Lac St-Jean avant de revenir en fin de semaine pour d’autres moments intimes. Je reprends ma routine maternelle.

Je regarde par ma fenêtre la rousseur du paysage. L’automne sera bientôt passé, les feuilles sont presque toutes tombées et malgré quelques rayons de soleil timides, la fraîcheur n’en finit pas de s’installer. Rien qu’une nouvelle semaine qui commence entre lac et forêt….

Feuille-d'eau

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