Déménagée
À moitié connectée, pas tout à fait emménagée, je profite d’une sieste de minipuce pour venir faire un tour en ces eaux familières. Tout un périple d’une semaine pour apprivoiser notre petite maison de galets. Nous avons commencé par camper dans le salon il y a une semaine. La petite chez sa grand-mère, nous avons trimé pendant trois jours pour repeindre, rénover, rafraîchir, emballer, déballer, bricoler. De courtes nuits (et des courbatures) pour alimenter de longues journées de labeur physique.
Dimanche soir, le plus gros était fait, nous avons récupéré Lily-Soleil, Juan a repris le travail lundi matin. Depuis les travaux tournent au ralenti. Il reste encore bien du travail: finir la chambre de bébé où nous campons présentement, idéalement changer le « tapis *» de mon futur bureau, chambre temporaire pour l’année à venir, installer nos nuits en cette pièce mitoyenne de la chambre de bébé Soleil. Finir la salle de bain…
Ah, la salle de bain! Que d’aventures en une semaine elle nous aura fait connaître! Tout à commencé le premier soir, une petite envie me prend et j’inspecte la pièce adéquate. J’avais déjà remarqué l’ignoble bol, cuvette plus du tout hygiénique qui accueille nos immondices personnels. J’astique avec dégoût la chose et ose à peine m’y poser. Je retourne voir Juan :
- Dis, t’as-tu regardé le bol de près?
- Heu non, pas vraiment, pourquoi?
- Ben c’est vraiment dégeulasse, on peut pas garder cette horreur! Il faut changer le bol en urgence!!!!
- J’ai pas vraiment fait attention, on regardera demain, viens te coucher…
Son air coquin m’attire comme un aimant et je laisse tomber le sujet dans ses bras. Un sujet qui pourtant me turlupine depuis les premières visites de la maison. J'en avais déjà discuté et nous nous étions déjà mis d’accord sur la nécessité de le changer.
Le lendemain, la veille de la fête du Canada, Juan commence à repeindre la salle de bain. Le jour précédent, nous étions allés chercher tout ce que nous avions besoin pour une première étape de rénovation à Home Depot. La salle de bain serait d’un orange volcanique enrobée d’Or Royal. J’ai bataillé dur pour avoir le droit de ces deux couleurs de mon choix.
- Etol, pas encore du vif!
- Allez, laisse moi avoir mon petit Mexique!!!
- Mais tu veux toujours les mêmes couleurs!!!
- J’ai besoin de ma dose de Sud! Allez, tu as bien choisi le salon, c’est moutarde et bourgogne comme Toi tu aimes…
- Tu veux pas essayer un vert avec ton orange?
- Non! Je veux Or Royal!!! Chacun sa pièce…
Après quelques autres essais de sa part pour me faire changer d’idées, il capitule et me laisse vivre mes couleurs chéries.
Notre chambre temporaire est bleu profond et vert d’eau. La chambre de Lily était jaune, nous avons décidé que cette couleur serait parfaite pour une chambre d’enfant , l’alcôve que nous avons dégagé d’une ancienne penderie est vert forêt, de la même couleur que la robe des Tinkerbell qui ornent l’un de ses murs. Cette pièce a demandé le plus de rénovation, Juan a bouché l’escalier, arraché le vieux tapis, enlevé le lino qui se cachait sous celui-ci pour ensuite reposer un nouveau plancher, ceci avec l’aide précieuse de notre ami Alex. Il manque une deuxième couche de vert dans l’alcôve à Lily et toute la disposition de sa chambre doit se faire puisque que c'est présentement notre terrain de camping! Mais pour en revenir à la salle de bain…
Juan commence « peinturer », il grogne gentiment de l’éruption de mon orange volcanique jusqu’au moment où il se retrouve à devoir peindre tout près du bol de toilette, objet de mes cauchemars! Il ne faut pas longtemps pour qu’il se rende à l’évidence, ce truc est une véritable horreur…
Lorsqu’il nous a vendu, Eugène le vieux garçon de 81 ans aimait nous dire qu’il nous offrait le paradis, une vraie maison pour se sortir du « shack », sur ce point, il n’avait pas tort. Cependant, le paradis terrestre a toujours des petits chemins qui débouchent sur l’enfer! J’entends Juan s’exclamer à plusieurs reprises : « Ouais, ben Eugène si la maison c’est le paradis, le bol c’est l’enfer! » Je m’esclaffe et en profite pour enfoncer le clou :
- Non, mais faut vraiment le changer, c’est horrible, ça a l’odeur d’une vieille pissotière!!! J’ai jamais vu ça! Il a au moins trente ans! C’est imbibé de pisse, moi, désolée mais je ne vais pas dessus! On peut pas vivre avec un truc pareil!!!
Il acquiesce et renchérit :
- Tsé quoi, j’pense que le papy Eugène, il visait plus vraiment juste, c’est vraiment intense! Ça pue, c’est hallucinant…
- Oh! My God! J’y avais pas pensé, mais c’est sur! À 81 ans ! Et en plus, avant lui, c’était déjà deux vieux bonhommes! J’te dis, c’est une pissotière pur jus!!!
Après avoir posé la première couche de peinture, nous embarquons sur le projet bol d'enfer. Comme c’est une fin de semaine fériée nous optons pour l’option de mettre celui qui se trouve en bas et que nous n’utiliserons pas. Mon sympathique nouveau beau-père aide l’homme a ce projet qui salit les mains et embaume les narines! Lorsque le vieux bol se retrouve sur le bord du chemin, j’en applaudis de soulagement. Yes! Mais c'est toute une histoire pour remonter son remplaçant, les jours filent et les toilettes se défilent! La cuvette de l’autre bol presque neuf est fêlée! Nous sommes donc rendus à l’étape : « Je tire ma chasse d’eau à l’ancienne. Avec un bon vieux seau! ». Cependant le nouveau lino de la salle de bain est un bonheur, ma laveuse et sécheuse sont en place, j’ai une salle de lavage! Après cinq années où le linge sale a côtoyé le réfrigérateur, ne plus faire ma lessive dans le coin cuisine, c’est génial! Sans compter l’immense fenêtre qui fait entrer lumière et verdure à l’intérieur. Toute la fenestration de la maison est extraordinaire.
En bas, tout est à refaire, enlever le vieux tapis, les murs. Refaire le plancher, des murs, une petite salle de bain et le plafond! Pour l’instant, cet étage abrite ma montagne de cartons qu’il me faut trier, laver, ranger, jeter, remonter…
En haut, tout est en bordel, le salon est en vrac, le lave-vaisselle (motivant mais inopérant) trône dans la cuisine en attendant qu’on puisse lui faire une place! Les joies du lave-vaisselle, nous en rêvons depuis six ans, c’est lui qui rendra possible mon apprentissage des fourneaux! Nous avons encore bien du pain sur la planche avant d’être vraiment emménagés. Heureusement l’ignoble bol a pris le bord! Nous nous sommes guère dépaysés, vu que nous résidons à 150 de mes pas du vieux chalet décrépi, sur le même coté de la rue! Ce bout de la rue est encore plus tranquille, sur la frontière de la forêt. Il y a des anglophones de passage, une mamie chat, jeune mariée de 73 ans, ma poulette préférée Eve, que je ne peux m'empêcher d'observer du haut de mon balcon! Sur ce bout de rue, seuls les chats déambulent…
Mon bureau n’est pas encore installé. Juan m’a traficoté une connection, mais il manque des fils qui se cachent dans un quelconque carton. Présentement pour aller sur Internet, il faut déconnecter le téléphone, pas super pratique! J’espère être rebranchée d’ici la fin de semaine. J’espère aussi remettre la main sur le fil qui me permet de décharger mon appareil photo…
Et au milieu de tout cela, il y a le Festival d’Été qui débute, une invitation de pendaison de crémaillère au bout du monde samedi, une invitation de barbecue et foot dimanche chez une amie de l’autre coté du St-Laurent. Pour faire avancer notre schmilblick domestique, il nous faudra encore nous coucher tard. Au milieu de toutes ces péripéties, le bonheur de changer de peau...
*Au Québec l'on n'utilise pas le terme moquette mais l'on parle de tapis pour désigner ces revêtements de sols.
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