mardi, janvier 13, 2015

Brève polaire...


Cri matinal de l'homme: 

- Aaaaaahhhh! Encore -30 à matin! Sans facteur vent! 

La mère s'exclame:

- Liloo, tu oublieras pas de mettre ton pantalon de neige pour revenir du bus! 

Et la puce de répondre:

- Okay, hier on était pas obligés pourtant! P'têt que le temps voulait nous donner un petit loose avant de reprendre la routine? 

Routine polaire en pleine action. L'homme sort faire chauffer le char. Il revient et me dit:

- J'en reviens pas, y'a des oiseaux qui gazouillent! 
- Je sais, j'te dis c'est fascinant!

Caricature mentale...

Quand, sous la douche, ma cervelle se fait une caricature mentale, ça donne ça en sortant...

"Après les fêtes, tout le monde sait que les divinités, fatiguées, prennent leur congé. Il ne reste plus grand monde à l’accueil du ciel et il est entendu qu'à cette saison, il faut s'armer de patience pour atteindre la porte d'entrée.

Cabu et sa bande sont dans la file. Mano, qui va et vient à sa guise, est venu tenir compagnie à son père et ses compères. Il est content de les revoir. C'est la fête dans la file. Devant ce joyeux bordel et les circonstances exceptionnelles du jour, deux employés divins s'organisent pour faire attendre la bande en une salle à part.

Les heures passent. Cabu, trop content de bavarder sans fin avec Mano décide de laisser passer tous les autres avant lui. Les voilà seuls dans la salle d'attente.

Sur la chaise en face de Cabu et Mano, en pleine conversation, apparaît alors Shérif Kouachi. En moins d'une minute, Shérif réalise qu'il n'y a pas de vierges qui l'attend. Merde, rien n'est ce qu'on lui avait promis ne l'attend ici! 

Il réalise d'un coup de masse tout le mensonge de sa vie. Terrassé par cette subite lucidité, il s'écroule en loque, sanglotant sur sa chaise.

Cabu le regarde, de cet air malicieux qui nous manquera, et il se lève. Il pose une main sur l'épaule du garçon effondré et de l'autre lui tend un carnet de note et un crayon en lui disant:

- Allez, dessine, tu vas voir, ça va te faire drôlement du bien!

Mano Solo regarde la scène, un sourire en coin, tout en fredonnant l'un de ses airs sur lequel on aimerait bien danser."



dimanche, janvier 11, 2015

Question d'enfance et chanson triste...

Regarder la nouvelle chanson de Tryo sur YouTube avec Miss Soleil qui me demande:

- Mais pourquoi on les as tués encore?
- Parce-qu'ils faisaient des dessins...
- Mais c'est pas rapport!?! C'est n'importe quoi.
- Je sais...
- Des dessins, c'est pas pour de vrai C'est juste pour s'amuser! Ils sont tous morts en même temps? C'est quoi la barbarie maman? Y'a plus de journal, y'a plus de Charlie? Charlie Hebdo aussi il est mort? Qu'est-ce qu'elle a fait la France? Ça veut dire que Charlie il vit encore?


Une forte émotion m'enserre la gorge, j'étouffe un sanglot tandis que mes yeux se mouillent. La Miss est partie dans un flot de questions toutes plus pertinentes les unes que les autres.

Une larme coule. Puis un ruisseau. L'enfant me regarde d'un air étonné. Je luis souris et j'essaie de lui répondre en retenant ces sanglots qui me nouent la voix.

Aujourd'hui avec Miss Soleil, on chante. On apprend par cœur la nouvelle toune de Tryo que l'on écoute en boucle!

En fredonnant: "On va rire et écrire Charlie... Au milieu du vacarme, du djihad et des armes, il reste la culture, l'humour et la nature..." 


Les étiquettes, c'est pour la nourriture, pas pour les humains!


J'ai marché à l'âge de neuf mois. L'histoire dit que le jour où j'ai marché pour vrai, c'était dans le couloir du notaire, le jour où mes parents allaient signer leurs papiers de divorce. L'histoire dit que ceux-là étaient fiers comme des coqs de me voir marcher.

La dernière fierté parentale, sinon l'unique, qu'ils auront partagé. L'histoire dit que je suis sortie du notaire en marchant toute seule. Avec le recul, je trouve ça pas mal symbolique.

J'ai passé tout mon primaire avec l'étiquette "enfant de divorcés" étampée sur mon front. Dans la petite école de village que je fréquentais, j'étais la seule en ce cas, la petite société qu'est une cour d'enfants, me l'a vite appris. J'ai même appris qu'elle devait être lumineuse et clignotante vu comment on la voyait de loin! La première fois qu'une de mes copines m'a dit:

- Je peux plus jouer avec toi. 
- Pourquoi? 
- Mes parents veulent pas que je joue avec toi. 
- Pourquoi? 
- Parce-que tu es une enfant de divorcés. 

Je me souviens avoir été profondément choquée. Je devais avoir six ou sept ans. En quoi est-ce que cela changeait qui j'étais? J'étais moi, parents divorcés ou pas, j'étais aussi humaine qu'eux. En quoi est-ce que cela faisait de moi un monstre?

Puis je me suis habituée à mon sort. Fuck les gens. Ma mère me disait souvent que si j'étais la seule, un jour, ce seraient le cas de plein d'enfants. Je ne trouvais pas ça particulièrement rassurant. À la fin de mon primaire, avant de m'engager trop loin en une relation amicale, je n'oubliais pas de mentionner: "Tu sais, je suis une enfant de divorcés".

Il a fallu que j'arrive en secondaire pour trouver d'autres enfants dans mon cas. Mais rendu là, j'avais appris à ne plus en faire de cas. Depuis les temps ont tant changé qu'on en a même oublié l'expression de l'époque. Être un enfant de divorcés n'est plus une étiquette à coller.

Cette expérience m'a appris très tôt à quel point toute forme d'étiquetage humain est ridicule. On est humain avant tout, les étiquettes c'est pour l'épicerie pas pour les gens!

Cette expérience m'a appris beaucoup de choses humainement. Elle a certainement sculpté l'adulte que je suis de multiples façons. Elle m'a dévoilée très tôt les laideurs humaines. Elle m'a forcée à en chercher les beautés.

Depuis que je suis maman, j'observe ma fille grandir. Entre père et mère. C'est un peu comme regarder un film hollywoodien pour la petite fille que j'ai, un jour, été. Souvent elle me parle entre deux pensées. Elle s'étonne, elle s'émeut, elle sourit. Elle me chuchote entre deux pensées: "Alors c'est ça avoir deux parents? C'est quand même bizarre tu trouves pas?" Parfois elle est blessée et laisse couler une larme.

Je suis toujours la défenderesse de la veuve et de l'orphelin. Ce qui fait que je peux ressentir une sorte de compassion pour les frères tueurs de Charlie Hedbo malgré l'horreur inexcusable de leurs actes.

Un trait de caractère qui peut prodigieusement énerver ma puce qui trouve que j'excuse trop les travers des enfants qui la tannent à l'école:

- Oh! Maman! T'es plate! Tu trouves toujours que c'est pas de leur faute parce-que leur vie est plus dure que la mienne! C'est pas juste! 
- Mais Liloo, il faut penser plus loin que le bout de son nez! Je te dis pas que t'es obligée d'être amie avec quelqu'un qui t'énerve! Pas du tout. Je te demande juste de penser à comment est leur vie et d'avoir un peu de compréhension  plutôt que de les critiquer! C'est tout! 

Je sais, je lui en demande beaucoup. Mais je lui en offre beaucoup et j'estime que cela compense. L'enfance que j'ai eu a façonné l'adulte que je suis et l'adulte que je suis façonne l'enfance qu'elle vit.

L'humanité est un long cycle qui tourne dans la roue du temps...

Je suis Charlie parce-que je me questionne...

Relayer une nouvelle sur Twitter et la voir s'enflammer. 1098 retweets plus tard, se dire que l'on a touché une corde sensible. Mes appareils mobiles en ont vibrés comme des fous!


"Je suis Charlie" dans la mesure où je respecte la liberté de tous de s'exprimer librement. Et encore plus celle de dessiner librement. Si on commence à fusiller tous ceux avec un humour qui nous dérange on est pas rendu!

Je désire vivre mon présent tout en élevant le futur (ma fille) en un monde où chacun peut rire et dessiner comme il l'entend. Je n'approuve pas nécessairement l'humour corrosif de l'hebdo mais je lui reconnais absolument le droit d'exister. Et c'est ce qui me fait Charlie. Mon amour passionnel pour la liberté d'expression.

Mais y'a un truc que je ne comprends pas. Si selon certains fanatiques, il est interdit de représenter Mahomet en image (et encore moins caricaturé) dans la religion musulmane, est-ce que cette règle ne doit alors pas s'appliquer qu'à ceux qui pratiquent cette même religion?

Si un musulman transgresse cette loi divine alors il blasphème. C'est un fait. Je le comprends. Je le respecte. Mais si un chrétien, un bouddhiste, un juif, un hindou ou un athée le fait, blasphème-t-il vraiment? Ne faut-il pas croire pour blasphémer? En quoi les lois musulmanes s'appliquent aux non-musulmans? Je ne comprends pas.

Toutes les grandes religions ont des branches extrémistes mais, que je sache, en 2015, un chrétien fondamental vivant au cœur  de la Bible Belt des États-Unis ne brûlera pas, sur un bûcher de la place publique, le New-Yorkais égaré qui possède une vierge Marie psychédélique tatouée sur un bras et le diable tatoué sur l'autre?

La question qui se pose alors est à savoir si le blasphème s'applique aux non-croyants? Ce faisant on se retrouve au coeur même du débat de la liberté d'expression qui fait rage. N'a-t-on encore passé le cap des religions dictatures? Combien d'humains devront mourir pour qu'on finisse par y arriver? Devrons-nous en vivre une troisième guerre mondiale?

Enfin, j'imagine que vouloir raisonner avec un intégriste, c'est comme se taper la tête contre un mur!

#JeSuisCharlie Le fait que ce hashtag soit devenu le plus populaire de l’histoire avec 3 655 056 tweets me rassure.


J'ai expliqué, sommairement, à Miss Soleil la situation Charlie Hebdo. Elle m'a alors posé des questions sur les méchants qui ont fait ça. Comment devient-on si méchant?

J'ai alors essayé d'imaginer la souffrance intérieure de ces deux orphelins. Élevés par une France où il est compliqué d'être. Pour en arriver là, la souffrance intérieure doit être puissante, viscérale. Ne réside-t-il pas un monstre dans chaque humain? Tout comme il réside un héros en chacun de nous? Ensuite vient l'intelligence, malheureusement inégale selon les humains. Et l'utilisation de cette intelligence à bon ou à mauvais escient.

Je ne peux m'empêcher de penser que les fondamentalistes religieux ont le sacré don de rattrouper ces humains, en grande souffrance intérieure, pour mieux nourrir leur folie humaine.

Au final, tout comme je partage la tristesse (et la révolte) de ces gens tués au combat de la liberté d'expression, je suis capable de ressentir une certaine compassion pour ces pauvres garcons qui ne connaissaient plus de la vie que l'étroitesse d'esprit et la haine.

Je ne crois pas à la haine. Ce qui ne veut pas dire que je suis incapable de la ressentir... je suis humaine. Mais je refuse de lui laisser la liberté de me transformer de l'intérieur. Car toute haine ne peut que transformer l'humain qui la ressent en sa pire version.

Cette semaine, on vient, encore une fois, d'en avoir la preuve sanglante.

jeudi, janvier 08, 2015

La liberté ou la mort?


- 40 dans le vent. Ce matin alors que le monde civilisé, en émoi, accuse le choc Charlie Hebdo, un froid polaire nous ramène à l'essentiel. Depuis l'aube, l'électricité saute toutes les vingt minutes, dix, quinze, trente secondes à la fois.

À chaque fois que ça coupe, on retient notre souffle, un souffle que l'on expire avec le retour du courant. Une voiture sur deux démarre. Le froid est si concret que l'oeil alerte peut le distinguer dans l'air figé. Aujourd'hui le froid tue, sans pitié, le con qui s'y aventure sans réflexion.

Depuis hier, comme des millions, je suis, via différents réseaux sociaux et médias, le mouvement d'indignation engendré par le massacre des journalistes du magazine satirique Charlie Hebdo.

Je pense à Cabu qui a bercé les mercredis de mon enfance avec Dorothée et sa bande. Souvenirs oubliés de ce Cabu que j'aimais bien. Subtiles émotions. En ce temps là, durant les années 80, je me souviens de la peur qui pouvait déjà régner à Paris avec une série d'attentats. Les temps changent mais pas les intégristes...

L'intégrisme, quel que soit la religion, est un poison.

Cabu n'est plus, il aura certainement rejoint Mano Solo, là bas, de l'autre coté. Je regarde défiler les images, via Twitter, Instagram, Facebook, des différents rassemblements qui se déroulent spontanément en Europe afin de soutenir la liberté d'expression. #JeSuisCharlie


Une onde de choc percute le monde civilisé. J'espère qu'elle touchera le monde pour le meilleur plutôt que pour le pire. Que du pire jaillira le meilleur. Je m'éloigne les idées de ceux qui se réjouissent de ce malheur pour mieux voir cette lumière humaine qui fait vibrer l'obscurité présente.

Montréal et Québec ont aussi leurs rassemblements. Cela me rassure. Cela me soulage. De mon coté, c'est au CHUL que j'irai à cette heure là. Mais c'est une autre histoire.

Aucune satyre ne mérite la mort...


Même si Charlie Hedbo pouvait pousser loin le bouchon, je veux croire que ce genre de provocation vise à faire émerger une certaine grandeur d'esprit humaine. À cultiver ce fameux grain de sel qui aide l'humanité à ne pas perdre la boule.

N'est-ce pas dans les différents degrés de réflexions que se situe la profondeur de notre humanité. Et la liberté n'est-elle pas dans l'expression de ces différents degrés?

Cependant, il faut admettre que cette provocation pique ceux qui ont l'esprit petit. Et Dieu sait qu'intégrisme et petitesse d'esprit font bon ménage! Bousculer les consciences intégristes est dangereux.

Cette tuerie s'attaque de plein fouet à la liberté d'expression mais au lieu de la tuer elle semble lui redonner de la force.

La réponse humaine à l'attaque est si déferlante, puissante, qu'elle me redonne espoir. Je veux croire que cette onde de choc servira le bien plutôt que le mal. Qu'elle éveillera et grandira les esprits plutôt que de les rapetisser.

Et je ne peux que trouver ce soulèvement humain, en réponse à la tragédie, inspirant. Cela a même tendance à me redonner confiance en l'humanité. En espérant que cette tragédie puisse mettre en lumière les noirceurs intégristes.

À condition que cette indignation ne retombe pas comme un soufflé une fois l'onde de choc passée.