L’écriture m’a depuis toujours semblé être un jeu dangereux pour l’esprit. Et toujours je me suis demandée comment faisaient ceux qui écrivaient des romans tout en travaillant à temps plein. Comment arrivent-ils à conjuguer les deux mondes!?! Cela reste pour moi un profond mystère...
Je n’écris pas pour l’argent mais pour le plaisir. J’ai naïvement cru dans l'enthousiaste de mes 20 ans que si j'y prennais autant de plaisir, à long terme cela ne pouvait qu’être payant, avec la trentaine je suis passée au travers de cette illusion. Je sais que je vais devoir penser "carrière monétaire". Je n’aime pas être pauvre et je me doute que si je continue à vouloir écrire à tout prix, je dois avoir une carrière "sociale". J’ai été longue à la détente. Encore aujourd’hui alors que j’y suis presque, nez à nez avec cette future carrière, je rechigne parfois et me rebelle toute seule. Dans le silence de ma bulle, je fulmine tandis que Juan rigole. Il a le don de me trouver marrante à toutes les deux minutes, mais ça doit être un effet secondaire de l’Amour...
En tout cas, pour moi est-ce qu'écrire de la fiction est un travail? J’ai souvent l’impression que c’est un jeu, un sport, un danger ou encore une drogue, mais un travail? À moins que l’on considère que l’on peut travailler en prenant son pied (Où se place donc la nuance entre travail et emploi?)!?! ...
L'écriture reste, à mes yeux, un jeu qui me remplit d'étranges frayeurs. Dans mon cas, j’ai besoin d’énormes plages de solitudes. C’est mon esclavage mental, l’écriture est mon maître, je suis son disciple. Si elle me demande de la solitude à gogo, j’essaie de la satisfaire de mon mieux...
Cependant si ce n’était que cela, ce serait presque simple. C’est plutôt ce qui se passe durant ces plages de solitudes qui reste un défi pour ma vie. Vu que j’adore inventer des mondes, tordre les réalités, je m’amuse à traire mon cerveau comme si c’était une vache à lait, mais quand il en a assez, il grogne, trépigne et cale...
J’aime m’isoler à l’intérieur de moi-même pour y creuser des histoires, j’aime aller à l’intérieur pour m’évader vers l’extérieur. Ce faisant, je me fais souvent bien peur...
Dans ces instants d’angoisses, je me demande jusqu'à quel point l’écriture est une drogue, ma drogue! Il y a ces moments de toute puissance et de clarté incroyable suivit de « downs » vertigineux. Ces moments de fuite et de douce évasion, ces voyages de l’esprit qui font halluciner d'autres réalités...
N’ayant jamais touché à la coke, j’ai souvent cuisiné des amis sur les effets qu’ils en ressentaient. Les écouter en parler m’a toujours ramené à l’écriture, cela me permettait de mieux comprendre, en parallèle, certaines sensations que je pouvais ressentir en écrivant seule dans mon coin...
Ma plus grande peur serait de commencer à écrire, intérioriser, m’isoler et partir en voyage au pays de l’écriture pour ne plus jamais en revenir. Rester prise comme avec un acid trop puissant sur un trip qui n’en finirait jamais de me marginaliser...
À l’adolescence, j’ai abdiqué ma volonté à cette dépendance des mots, qui s'est révélée un vrai chemin de croix pour mes jours. Je n’ai pourtant jamais abandonné l’espoir d’avoir une vie normale au quotidien! Mais ma dépendance est aujourd’hui si grande que je me demande si je ne suis pas comme un opiomane grave. Si je devais arrêter, j’en mourrais sûrement...
Cependant, ce n’est pas la mort que je crains le plus, c’est la folie. Avec les années, j’ai développé ma propre théorie sur le sujet. En me cassant la gueule quelques fois j’ai trouvé et posé mes propres repères. Ainsi lorsque je commence à trop ressentir les symptômes de ce que je nomme le syndrome Camille Claudel, je me force à regarder le danger en face. Ce qui a souvent pour effet de me faire paniquer et stopper net ce que j’ai en plan! Je suis vraiment trop peureuse mais avec l’age je prends du courage. Avoir une relation émotionnelle saine est vital, le danger de la folie artistique trop réel pour ne pas en tenir compte. Combien de ceux qui se sont plongés dans des solitudes artistiques n’en sont pas revenus? Combien ont succombé, sûrement trop pour pouvoir les compter...
Chaque fois que l’on quitte ce réel qui nous héberge pour partir à la recherche de l’inspiration, de la perfection, l’esprit est mis à rude épreuve. Il a parfois bien du mal à retrouver le chemin du corps et du quotidien. Cette gymnastique de cerveau est comme tout sport extrême, il peut causer d’énormes dégâts à la personne. Ou alors donner de la forme et de la force, tout dépend de comment on le pratique, i guess...
Est-ce qu’écrire est un sport, une drogue ou un travail, c’est une question qui prend plaisir à me tourmenter les idées. Une question sans réponse, c’est les pires de leur race!!! Celles qui sont le plus coriaces, elles ne lâchent jamais le morceau! Comme toute question cherche une réponse. Celles qui n’en trouvent pas deviennent des fantômes colériques qui flottent en silence dans les limbes des pensées cachées de tous...
L'âge mûr ~ Camille Claudel
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